home People, RD Congo, Société RDC : Sindika Dokolo, le tragique destin d’un « Dandy Boy » à Dubaï

RDC : Sindika Dokolo, le tragique destin d’un « Dandy Boy » à Dubaï

« C’est un destin tragique que celui qui vient d’emporter un « Dandy boy » de sa génération avec la disparition brutale de Sindika Dokolo. Sa passion de sport extrême l’a conduit jusqu’à la mort ».Ces propos d’un proche membre de la famille en douloureuse peine sont venus dissiper les doutes de ce redoutait tout le monde : la mort tragique de Sindika Dokolo à Dubaï aux Emirats Arabes Unis, que les réseaux sociaux annonçaient depuis la fin de la journée du jeudi 30 octobre 2020.

Une nouvelle triste pourtant confirmée par sa famille via son compte Twitter officiel le vendredi 31 octobre 2020 bien que son épouse eût publié sur Twitter et sans aucun commentaire une des dernières photos du couple à la mi-journée du jeudi avec leur fils avant le drame : « La Famille Dokolo, son épouse, ses enfants, sa mère, son frère et ses sœurs ont la profonde douleur et l’immense tristesse de faire part du décès de Sindika Dokolo, survenu ce jeudi 29 octobre 2020 à Dubaï. La Famille remercie par avance toutes les personnes qui prennent part à sa peine ».

L’homme d’affaires congolais et collectionneur d’arts Sindika Dokolo âgé de 48 ans serait décédé accidentellement au cours d’une plongée sous-marine en début d’après-midi du jeudi 29 à Dubaï où sa famille avait élu domicile après leur départ précipité de Luanda en Angola. Il serait victime d’une embolie pulmonaire lors de la remontée que le médecin légiste déterminerait les causes dans les jours à venir.

Né à Kinshasa dans l’ex-Zaïre le 16 mars 1972, il était le fils de feu Augustin Dokolo Sanu, l’unique homme d’affaires Zaïro-Congolais propriétaire d’une banque privée, la Banque de Kinshasa (BK) et Hanne Kruse, une Danoise qui vit toujours à Kinshasa où elle est arrivée en 1966. Homme d’affaires florissant sous le régime de Mobutu Sese Seko, son père était tombé en disgrâce avant le renversement du vieux maréchal le 17 mai 1997.

L’homme d’affaires et mécène qu’on disait lui-même millionnaire a grandi en partie Belgique après sa naissance à Kinshasa en RDC, puis en France ; où il a fait ses études avec BAC au Lycée Saint-Louis-de-Gonzague, fief de la haute bourgeoisie de l’ouest parisien avant de poursuivre des études universitaires à La Sorbonne Université, Campus Pierre et Marie Curie.

Marié depuis 2002 à Isabel dos Santos, fille de l’ancien président angolais José Edouardo Dos Santos ; Sindika Dokolo était un homme d’affaire avisé et collectionneur d’art africain était reconnu pour son combat pour la restitution des œuvres spoliées à l’Afrique. Il avait organisé en septembre 2019 une exposition intitulée « Incar-Nations » au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.

Son combat pour la défense de l’art africain restera inachevé comme celui de son père qui fut également connu pour être un grand collectionneur d’art africain. Le fils Sindika s’était révélé l’un des grands militants pour le rapatriement des œuvres et objets d’art africains spoliés par les grands musées européens et américains. « Cette chasse aux objets perdus lui a déjà permis de restituer une vingtaine d’œuvres au musée de Dundo au nord de l’Angola, son pays d’adoption », apprend-on du journal Libération qui l’avait rencontré en 2019.

Des ennuis avec l’Angola

Depuis le départ en 2017 de son beau-père José Eduardo dos Santos, après 38 ans de règne à la tête du pays Depuis le départ en 2017 de José Eduardo dos Santos, après 38 ans au pouvoir, son dauphin et successeur Joao Lourenço a limogé, au nom de la lutte contre la corruption, tous les proches que l’ancien président avait placés à la tête des institutions, des entreprises publiques et de l’appareil sécuritaire du deuxième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne.

Le couple Sindika -Isabel a commencé a avoir des ennuis avec le gouvernement angolais. La fille de l’ancien président et son homme d’affaires d’époux sont alors accusés par la justice et le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) d’avoir pillé les caisses de l’Angola pour nourrir leurs affaires privées. Selon le parquet général angolais chargé du dossier, ces malversations ont été évaluées par le gouvernement de Luanda à près de cinq milliards de dollars.

La fuite de 715 000 documents exploités par ce consortium de 120 journalistes avait révélé dans une enquête, les « Luanda Leaks », que le couple avait accumulé frauduleusement une fortune de plus de deux milliards de dollars, ce qu’il avait toujours nié.

Lire aussi : ANGOLA : « Expliquez-nous » : La femme la plus riche d’Afrique en fuite, accusée d’avoir détourné plus d’un milliard de dollars https://www.afriwave.com/2020/01/22/angola-expliquez-nous-la-femme-la-plus-riche-dafrique-en-fuite-accusee-davoir-detourne-plus-dun-milliard-de-dollars/

Début 2020, le couple avait vu ses avoirs gelés en Angola par la justice du pays qui les accuse d’enrichissement illicite, de blanchiment d’argent, après le départ du pouvoir de l’ex-président Dos Santos. Le demi-frère d’Isabel, José Filomeno Dos Santos, ancien directeur du fond souverain angolais ; s’est vu condamné par La Cour suprême angolaise à cinq ans de prison pour les mêmes faits de corruption.

Le procureur général d’Angola n’excluant pas de délivrer un mandat d’arrêt international contre la femme d’affaires angolaise Isabel Dos Santos, l’ex-présidente de la société pétrolière publique Sonangol (juin 2016-novembre 2017) ; suspectée de corruption dans son pays et au Portugal.

En décembre, un juge civil de Luanda avait ordonné le gel des comptes bancaires et des actifs d’Isabel Dos Santos et de Sindika Dokolo, dans une pléiade de sociétés angolaises. Dans la foulée, la justice portugaise avait à son tour gelé les comptes et certains de leurs actifs au Portugal, où ils ont investi dans la banque et la téléphonie. En septembre 2020 dernier, ce fut au tour des autorités néerlandaises de geler également les actifs d’une société contrôlée par Sindika Dokolo. Encore une fois, les enquêteurs soupçonnant le couple d’un détournement de plusieurs dizaines de millions d’euros d’argent public de leur pays d’origine, l’Angola.

Héritier d’une belle fortune de son père à 29 ans, Sindika Dokolo avait rencontré sa future épouse, métisse comme lui en 1999 au Miami Beach de Luanda, repaire de la jet-set angolaise et premier investissement d’Isabel.

Au fil de temps, le couple dont la femme serait la plus riche d’Afrique d’après le magazine Forbes s’était enrichie en diversifiant des investissements dans la téléphonie, les mines de diamants, la banque, l’immobilier… En Angola, Sindika Dokolo possède une des plus grandes mines de diamants et le « Palais de fer », la plus grande salle de spectacles de Luanda.

A ceux qui en Europe dans le milieu des banques, disait que leur couple présentait un « risque de corruption » ; Sindika Dokolo retorquait : « Je n’accepte pas que nous, les Africains riches, devions nous excuser ou nous justifier. Je préfère que la richesse du continent revienne à un Noir corrompu plutôt qu’à un Blanc néo-colonialiste ». Tout était dit !

Initiateur du Mouvement Les Congolais Debout

Outre les affaires dont il était doué, l’homme Sindika Dokolo se voulait aussi un activiste pro-démocratie dans son pays la RDC où il a lancé depuis Paris en France en août 2017 un mouvement dénommé « Les Congolais Debout » aujourd’hui orphelin, avec un objectif : pas de troisième mandat pour le président Joseph Kabila de la tête du pays.

Après un exil forcé dû aux tracasseries du régime Kabila, Sindika Dokolo était retourné à Kinshasa en mars 2019, 45 jours après l’investiture de l’opposant Félix Tshisekedi, proclamé vainqueur de la présidentielle de décembre 2018 et qu’il avait rencontré.

Lire aussi : RDC : Sindika Dokolo et sa Force Tranquille, une lame de fond qui monte et qui fait peur ! https://www.afriwave.com/2017/07/13/rdc-sindika-dokolo-et-sa-force-tranquille-quid-dune-lame-de-fond-qui-monte-et-qui-fait-peur/

Dans son pays d’origine la RDC, Sindika Dokolo et son frère Luzolo Dokolo avaient été condamné dans une affaire immobilière qui l’a empêché pendant longtemps d’y revenir. Ne s’étant jamais déclaré candidat à un quelconque poste politique, Sindika Dokolo et son mouvement citoyen Les Congolais debout s’étaient investi contre un troisième mandat de Joseph Kabila. Mais ils espéraient aussi voir les Congolais s’engager en politique pour ne pas laisser toujours le champ libre aux politiciens. Un rêve inachevé.

Roger DIKU et Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi

print

Partagez