L’ancien premier ministre Matata Ponyo Mapon condamné à 10 ans des travaux forcés

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Le verdict du procès dans l’affaire dite du « Parc Agro-Industriel de Bukanga Lonzo » entre 2013 et 2016 est tombé mardi 20 mai 2025. L’ancien Premier ministre de Joseph Kabila de 2012 à 2016, Augustin Matata Ponyo Mapon est condamné par la Cour constitutionnelle à dix ans de travaux forcés pour détournement de fonds publics

10 ans de prison à faire appliquer par le procureur général, et 5 ans de privation d’accès aux fonctions publiques, du droit de vote et de libération conditionnelle contre Matata Ponyo, c’est moins que les 20 ans de détention qu’avait requis le procureur général de la République, John-Prospère Moke le 23 avril 2025 lorsque la Cour avait abordé pour la première fois le fond de cette affaire, et ce encore en l’absence des trois prévenus.

Absent lors du prononcé du jugement, Matata Ponyo a été reconnu coupable de deux faits. D’abord du détournement de plus de 156 millions de dollars, concurremment avec Christo Grobler Stéphanus. Puis, avec Deogratias Mutombo, du détournement de 89 millions de dollars qui avaient été alloués à la construction du marché international de Kinshasa dans la commune de Maluku, rattaché au projet Bukanga Lonzo ; deux projets qui n’ont jamais abouti. La Cour constitutionnelle a également ordonné la confiscation de leurs biens au prorata des sommes détournées.

Ses deux co-accusés également absents du pays, Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC) et membre de la famille Kabila ; ainsi que le sud-africain Christo Grobler Stéphanus, responsable de l’entreprise Africom Commodities, écopent respectivement chacun à « cinq ans des travaux forcés », selon le verdict. Malgré son absence, la cour a par ailleurs décidé de « l’expulsion définitive » de Grobler Christo du territoire de la RDC après l’exécution de sa peine.

Cette condamnation définitive sans aucune possibilité de recours marque la fin d’une bataille juridique de près de quatre ans qui a connu plusieurs rebondissements depuis son ouverture en 2021 avant sa reprise d’octobre 2023. La cour ayant conclu que Matata Ponyo avait « conçu, participé et bénéficié » au détournement de fonds en validant des paiements surfacturés et des travaux non exécutés a déclaré le président de la Cour constitutionnelle, Dieudonné Kamuleta Badibanga lors d’une audience publique.

Un projet phare qui a fait faillite

L’on se rappellera que lancé entre 2013 et 2016, le Parc Agro-Industriel de Bukanga Lonzo dans la province de Kwango devait symboliser la renaissance agricole du pays. Un projet d’envergure nationale qui visait à transformer un vaste espace en centre agro-industriel moderne, créateur d’emplois, fournisseur de denrées alimentaires locales, et levier contre la pauvreté rurale ; il devrait se dupliquer dans l’ensemble des provinces.

Comme jadis pour le Domaine Agro Industriel Présidentiel de la N’Sele (DAIPN) sous Mobutu, tous les espoirs suscités en Bukanga Lonzo ont rapidement laissé place au désenchantement avec moults soupçons révélés dès novembre 2020 dans un rapport accablant de l’Inspection Générale des Finances (IGF) qui mettait en lumière de graves disfonctionnements et autres irrégularités : choix arbitraire de partenaires, absence de mécanismes de contrôle, surfacturation, détournements massifs et abandon du chantier dont l’IGF en avait alors attribué la responsabilité principale à l’initiateur Matata Ponyo, alors Premier ministre et qui lui vaut condamnation aujourd’hui.

Ce rapport mettait en lumière que 205 millions de dollars, sur 285 millions décaissés par le Trésor public pour ce projet pilote avaient été détournés. Un premier procès pour détournement s’était ouvert en octobre 2021 devant la Cour constitutionnelle, jugeant en premier et dernier ressort. Puis, en novembre de la même année, la même cour s’était finalement déclaré « incompétente » pour juger un ancien Premier ministre.

En juin 2022, alors qu’Augustin Matata Ponyo était sénateur, la Cour de cassation, compétente pour juger notamment les parlementaires, s’était saisie du dossier. Après quelques semaines, elle avait renvoyé l’ancien premier ministre devant la Cour constitutionnelle pour cette même affaire.

A lire aussi : RDC : Matata Ponyo écrit à l’IGF et s’explique sur la déconfiture du Parc Agro-industriel de Bukanga-Lonzo https://www.afriwave.com/2020/09/04/rdc-matata-ponyo-ecrit-a-ligf-et-sexplique-sur-la-deconfiture-du-parc-agro-industriel-de-bukanga-lonzo/

Un procès politique

Actuellement député national et président du parti politique Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD) qui se réclame de l’opposition, pour sa défense, l’ancien candidat à l’élection présidentielle de décembre 2023 qui s’était rallié en faveur de Moïse Katumbi a toujours dénoncé d’un côté ce qu’il dit être un « procès politique » à son encontre et n’a jamais reconnu la compétence de la Cour constitutionnelle à le juger en tant qu’ancien Premier ministre.

De l’autre, devenu député national lors des élections de 2023 ; il évoquait une violation de ses immunités parlementaires. Ce à quoi la Cour avait en réponse argué du fait que son immunité de sénateur avait bien été levée avant les dernières élections générales et législatives.

A lire aussi :  RDC-JUSTICE : De quoi a peur Augustin Matata Ponyo Mapon dans le dossier Bukanga Lonzo ? https://www.afriwave.com/2021/08/13/rdc-justice-de-quoi-a-peur-augustin-matata-ponyo-mapon-dans-le-dossier-bukanga-lonzo/

Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi pour afriwave.com

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