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LA CRISE DE LA RDC [ANALYSE]

63 ans après son indépendance, la RDC est aujourd’hui à la croisée de son chemin d’existence en tant que Nation. Si le destin du pays dépend de la volonté politique de ses acteurs à vouloir changer radicalement d’approche, c’est la formule technique qui lui manque. « C’est cette approche qui doit être la priorité des priorités dans le sens que le leadership politique doit investir dans la connaissance technique qui est le problème majeur qui fait préjudice à la gouvernance et qui est la source des crises » successives du pays.

Avec un groupe des compatriotes congolais du pays et de la diaspora réunis au sein de DRC Seminars Platform, Monsieur Kampap Katamanval, politologue, consultant et chercheur indépendant formé à Oxford en Grande-Bretagne initie depuis des mois une série des formations et des réflexions.

Titulaire d’un parcours universitaire interdisciplinaire dans les questions des stratégies techniques pour une bonne gouvernance et technocrate en Grande Bretagne, Kampap Katamanval réfléchit sur une base des connaissances techniques qui permet d’approcher la crise de la RDC sous un angle complètement différent et original. Le document ci-dessous est sa première réflexion sur la RDC, un cas pouvant être d’application à la majorité des pays africain post indépendance.

Pour lui, « l’intervention technique qui est au-delà des partis politiques qui doterait le pays des instruments de gouvernance qui font défaut à l’administration de la RDC depuis son indépendance. Ce concept technique permettrait de résoudre les catalogues des problèmes comme le désordre, le tribalisme, la fraude, la corruption, les infrastructures, qui en réalité ne sont que des résultants du déficit en connaissance technique. Tant que ce problème central ne sera pas résolu, les mésaventures politiques qui avaient commencées à l’Independence continueront jusqu’à ce que le pays explose. Si en tant que peuple, nous resterons incapables de comprendre les enjeux ainsi que nous rassembler autour d’un programme technique pour résoudre la crise de la gouvernance, la décision concernant l’existence de la RDC sera prise pour nous par d’autres peuples en fonction de leurs intérêts et nous deviendrons esclaves sur notre propre terre héritée de nos ancêtres ». 

Pour toute information concernant les séminaires de formation, les consultations en matière de conseils techniques et les projets sis mentionnés, veuillez contacter l’auteur Kampap Katamanval. Contact e-mail: goodgovernance.secretariat@gmail.com

La Rédaction

LA CRISE DE LA RDC [DOSSIER]

Partie I

1. Préambule 

La Rdc qui aurait dû être parmi les pays les plus puissants du continent Africain à côté de l’Afrique du Sud en raison de sa taille, de sa grande variété de ressources naturelles et de sa forte densité dominée par une jeunesse relativement instruite ; au contraire le pays est compté parmi les plus pauvres de la planète. 

Pourquoi en est-il le cas ? Quelle est la solution ?  Est-ce que tout est perdu ? La réponse à ces questions est l’objectif principal de cet article.

 Lecteurs et lectrices visés par ce document :

  • Les acteurs politiques
  • Les leaders des partis politiques ainsi que leurs membres 
  • Le leadership de différentes dénominations religieuses et leurs membres
  • Les académiciens
  • Les étudiants
  • Les médias 
  • Les congolais et congolaises instruits
  • Les membres de la société civile et les différentes organisations œuvrant dans le dessein de résoudre la crise congolaise

2. Introduction

Cet article ne se penche ni sur la politique mondiale ni sur la géostratégie, il est intentionnellement limité à la gouvernance de la Rdc.  Il aborde la crise de la Rdc sous l’angle technique qui va au-delà des conventions académiques établies qui sont basées sur des théories souvent détachées de la réalité.   La force de cet article réside dans son originalité à approcher la crise de la Rdc d’un point de vue technique et à être en mesure de proposer une solution incluant la stratégie de sa mise en œuvre.   

L’article est divisé en trois parties : 

La première partie fait un bref diagnostic du problème, la deuxième partie propose la solution et la troisième partie offre la formule pour en arriver à la solution. 

3. La problématique

Confronté à une crise dont la complexité comme la taille vont au-delà des théories académiques et perdu, le congolais instruit va s’aventurer dans un domaine crucial qui est la politique dont le destin de toute une nation dépend ; sans préparation ni compétences requises, avec des conséquences catastrophiques pour le pays et la Nation toute entière. 

Et pourtant toute tentative sérieuse de résoudre une crise aussi complexe doit commencer d’abord par définir la nature du problème.  Cela signifie, établir si la crise de la Rdc est vraiment une crise politique ou s’il s’agit d’une crise technico-administrative dont les manifestations prennent une forme politique.  Cette clarification est importante car elle déterminera la nature de l’intervention nécessaire.  Une crise politique peut être le résultat d’une simple différence idéologique ou une différence d’opinion par rapport à un problème donné.  Par contre une crise technique est une crise opérationnelle dont les conséquences peuvent affecter voire même paralyser les capacités de l’ensemble d’un système à fonctionner.  Cette brève et simple définition peut nous aider à définir la crise congolaise dont il est important de noter que les premières causes remontent à l’indépendance. 

4. Résumé des évènements marquants la crise qui a suivi l’indépendance :

Le 5 juillet 1960, cinq jours seulement après l’indépendance, le drame commence avec la Mutinerie de la force publique, à la suite de la déclaration du général Emile Janssens : « Avant l’indépendance égale après l’indépendance ».  Lumumba et Kasa Vubu interviennent alors pour essayer de calmer les soldats, demandant ainsi aux responsables blancs qui étaient restés après l’indépendance pour former les congolais à la fois dans l’armée et l’administration, à quitter le pays.  Au lieu de résoudre la situation, cette intervention a eu les effets inverses, car elle détruit toute chance de transition convenue entre le Congo avec la Belgique.   

Le 11 juillet, Sécession katangaise. 

Le 8 août, Sécession du Kasaï.

Le 5 septembre, Kasa Vubu révoque Lumumba sur motif « désordres publics, suppression des libertés fondamentales et guerre civile atroce ».  Le Parlement refuse d’accorder à Kasa Vubu le pouvoir de rétrograder Lumumba.  Ce dernier se rend à son tour au Parlement pour demander un pouvoir exceptionnel de destituer Kasa Vubu.

Le 11 septembre, alors que cette confusion se poursuit à l’instigation des USA et de la Belgique, Lumumba est arrêté par Mobutu. 

La même année le pays est divisé entre Kinshasa, Bakwanga, Kisangani et Katanga. 

Après que Lumumba est éliminé en 1961 et la Sécession katangaise résolue en 1963, plutôt que le retour à la paix, la crise de gouvernance marquée par le désordre et la confusion continuera comme à l’accoutumé à Kinshasa jusqu’au coup d’État de Mobutu en 1965. 

5. De la crise de gouvernance à la politique prédatrice 

Loin de résoudre le problème qui était au-delà de ses capacités, le président Mobutu s’engage dans le meurtre farouche de ses opposants.  Cette pratique a tout simplement étouffé la face visible du problème, mais les vraies causes qui sont au centre de cette crise de gouvernance et qui donnent naissance aux aventures politiques demeurent intactes.  Le semblant de paix résultant de ces meurtres va donner naissance à une nouvelle politique prédatrice ou le pillage de ressources du pays sera l’activité principale des politiciens.  En surface, cela a l’air calme et Mobutu a réussi à asseoir son pouvoir.  En-dessous le problème central persiste et refait surface comme une éruption volcanique, une fois Mobutu affaibli comme c’est le cas au début des années 1990 avec la conférence nationale, puis la crise rwandaise et la soi-disant démocratie, ou plus précisément la démocratie à la congolaise qui a donné naissance à une centaine de parties politiques prétendant apporter la solution à un problème dont la taille, la complexité ainsi que la compréhension dépassent de loin leurs compétences intellectuelles et leur savoir-faire.  Pour l’élite congolais, battre la campagne, faire des discours et lancer des slogans c’est ça la politique cependant, gouverner est une science qui demande des compétences spécifiques pour organiser un pays et ses institutions.  Ce n’est pas par hasard que les acteurs politiques et administratifs se livrent collectivement au détournement de deniers publics.  Dans la majorité des cas, ces détournements sont le résultat du gouffre qui existe entre les responsabilités et le déficit en compétences dans un système sans mécanisme opérationnel ni préparation préalable.  Dépassés par la complexité et la taille des responsabilités, ne sachant pas par où commencer, quelle direction prendre et pour quelle destination, les acteurs se livrent à la prédation des ressources du pays. 

6. Quel est le vrai problème ? 

Les premiers diagnostics de la crise congolaise ont conclu que celle-ci était due au fait que la Rdc comptait seulement qu’une poignée de diplômés à l’indépendance.  Mais, aujourd’hui la Rdc dispose des masses de diplômés universitaires qui se comptent en millions et dans presque tous les domaines sous le soleil, formés à la fois au Congo et à l’étranger, y compris dans certaines des meilleures universités de la planète.  Malgré ces prouesses académiques, la crise est ironiquement pire qu’elle ne l’était après l’indépendance.  Le pays est dans un état de chute libre où la majorité de la population vit en dessous de ce qui est considéré comme le seuil de pauvreté acceptable.  Rien ne marche à part les théâtres politiques qui sont devenues une partie intégrante de la culture et de l’identité congolaise.  Le Gouvernement n’est pas en mesure de gérer le pays et d’exercer efficacement son autorité au-delà de Kinshasa.

Le système administratif précaire laissé par la puissance coloniale belge a déjà été démantelé.  Le pays est dans un état de confusion totale, il ne peut pas retourner à l’époque précoloniale antérieure à l’existence de la Rdc, de même, il ne peut pas avancer sans savoir dans quelle direction y aller et surtout comment.  

Le pays est submergé par des multiples défis dont certains (défis 1) résultent de sa taille comme de ses variétés ethniques qui par l’absence de l’État dans le vrai sens du terme (les variétés ethniques) se sont dégénérées en tribalisme qui à son tour alimente et protège le système prédateur sous la formule « c’est notre tour de manger» permettant aux prédateurs à se maintenir au pouvoir grâce au soutien tribal ou régional – phénomène général qui n’épargne pas une seule tribu au Congo malgré les études qui ont donné naissance à l’émergence d’une classe moyenne (la classe moyenne dans ce contexte fait référence aux congolais instruits au niveau du baccalauréat et au-delà); certains (défis 2) proviennent de l’incompétence ainsi que de la confusion résultant de mésaventures politiques dans un système sans structure ni mécanisme opérationnel;  certains (défis 3) sont liés à la présence de ressources naturelles dont on n’ignore la valeur et les conséquences.  Il en résulte enfin une politique interne basée sur la prédation qui facilite l’ingérence extérieure dans la gestion des affaires internes de la Rdc bloquant ainsi toute possibilité de changement.  La combinaison de ces facteurs a entraîné le pillage du pays par les étrangers comme les congolais avec la complicité de ces derniers.  Eu égard de ce qui précède, le pays a été totalement détruit : la crise d’identité, l’insécurité tous azimuts, la pauvreté, l’anarchie, la confusion, l’infiltration des institutions congolaises par des étrangers etc.  En bref, l’existence de la Rdc comme État est devenue hypothéquée et incertaine. 

7. Le Dilemme congolais

La classe instruite et la jeunesse qui devraient être des instruments primordiaux à travers lesquels on construit une Nation se retrouvent en face d’un dilemme où ils doivent choisir entre ces quatre options : 

  • Option 1 – Émigrer vers l’Occident en laissant le Congo derrière 

Cette option fait que malheureusement nous émigrons avec le Congo dans nos valises tout en amenant avec nous la culture de la musique, le désordre, l’oisiveté, l’indiscipline etc.  Les éléments précités sont devenus notre constitution génétique culturelle dont nous ne parvenons pas à nous défaire.   Dès lors en Occident, nous nous retrouvons souvent au bas de l’échèle comparativement à d’autres africains qui sont plus intégrés professionnellement.  D’où la diaspora congolaise est quasi non bénéfique à la Rdc ;

  • Option 2 – Rester au pays  

Cette option consisterait à rejoindre le système existant pour prendre part dans le partage du gâteau tantôt d’une façon ou tantôt d’une autre et surtout quand on appartient dans le camp de ceux dont c’est « leur tour de manger » ;

  • Option 3 – L’entrepreneuriat

Cette option est un mélange des différents acteurs.  Elles combinent des politiciens, des petits opérateurs économiques ainsi que les membres de la diaspora qui investissent au pays malheureusement, cela se déroule dans un environnement sans une administration viable où la loi de la jungle règne et l’État est incapable de jouer son rôle de facilitateur ainsi que celui de garant de la sécurité ; 

  • Option 4 – La loi de la survivance naturelle

Cette option concerne le reste de la population qui par ailleurs constitue la majorité.  Elle est dépourvue de tout soutient étatique par manque de connexion avec la classe dirigeante et doit se battre pour sa survie quotidienne. 

Les quatre options représentent le dilemme des congolais face au malheur auto-infligé par l’aventurisme politique dont le résultat a été la destruction du pays en infligeant le désarroi sur toute la Nation. 

8. La crise culturelle et celle de gouvernance

Les options du dilemme congolais ne démontrent pas seulement les effets de la crise congolaise, plutôt elles permettent aussi de comprendre la crise congolaise sous un angle différent dans le sens que la première option qui est celle de l’immigration nous donne une bonne indication du problème congolais.  Accueilli dans un nouvel environnement, le congolais devrait laisser les habitudes nuisibles derrière eux pour en enquérir des nouvelles, mais le contraire s’est produit ; il est devenu apparent que ce n’est pas le Congo qui est le problème mais plutôt le congolais.  Nous avons du mal à opérer dans le nouvel environnement souvent bien organisé administrativement et où la méritocratie est la règle principale du jeu.  Nous nous retrouvons souvent désemparés, incapable de fonctionner d’où on tend à opter pour l’option des petits boulots, de la fraude ou de l’économie souterraine à une vie de carrière honnête et intègre.  Cependant, nous restons attachés aux diplômes et aux titres académiques.   

C’est cette crise culturelle, cette crise de mentalité qui devrait être la préoccupation des partis politiques et le leadership politique au lieu de rêver de transférer les grattes ciels de New York et les autoroutes de Paris et Londres au Congo comme projets de sociétés. Comment refaire l’homme congolais afin qu’il prenne conscience de son destin en le responsabilisant et en l’équipant du sens du devoir patriotique pour créer l’infrastructure humaine qui fait défaut au Congo malgré l’abondance des diplômes, c’est ce qui devrait être le centre des projets des sociétés des partis politiques afin de refaire l’État congolais.  

La crise culturelle et celle de gouvernance sont les deux faces de la même monnaie.  Cette crise issue de l’histoire du Congo provient du fait que la Rdc était mise en place comme une zone de libre-échange accessible à toutes les puissances européennes.  C’est ce phénomène de faux État qui est la racine de la crise de gouvernance qui a son tour a donné naissance à la crise culturelle, les deux facteurs combinés ont mis l’élite congolaise en face de l’équation de l’œuf et de la poule.

Avec la découverte de ressources naturelles d’une ampleur jamais anticipée par les puissances coloniales, la Rdc est devenue la principale réserve de ressources naturelles dont dépend en partie l’économie mondiale et par implication le système financier international, les multinationales occidentales, les différentes industries manufacturières qui fait l’économie globale.  En d’autres termes, l’ensemble du projet capitaliste dépend en grande partie de l’approvisionnement en ressources naturelles en provenance de la Rdc.  En raison de ses ressources, sa taille et le volume de sa population, la Rdc devrait être en mesure de traiter avec des États puissants de la planète pour leurs besoins industriels qui ne peuvent être satisfaits sans ce dernier.  Comment alors un pays qui joue un rôle aussi important dans l’économie mondiale peut-il fonctionner sans un système politico-administratif adéquat ou un appareil gouvernemental approprié ?  Cela n’a aucun sens ! 

                                                                      Partie II

9. L’intervention technique

Pour résoudre ce défi existentiel, la Rdc aura besoin d’une intervention technique capable de mettre en place un programme des réformes structurelles solides. Un projet de cette envergure aura un caractère national qui irait au-delà des partis politiques, des intérêts privés, tribaux et régionaux. Il s’agirait d’un projet inclusif où les politiciens de différentes allégeances doivent venir ensemble dans un Gouvernement d’unité nationale dont le but serait de sanctionner le projet d’intervention technique pour le bien commun qui consisterait à mettre en place les conditions nécessaires dont l’infrastructure humaine et les structures adéquates pour faciliter la gouvernance du pays.  C’est seulement quand ce travail d’intervention technique qui nécessiterait une combinaison de compétences et connaissances, serait effectué que le débat politique pourrait être élevé au niveau requis pour que la Rdc puisse changer de direction. Ce travail nécessiterait la maîtrise totale du nœud du problème qui doit être séparer des manifestations qui ont une forme plutôt visible telle que la politique prédatrice, le tribalisme, l’incompétence, la crise de leadership etc.  Tant que les causes réelles du problème ne seront pas maitrisées et isolées pour être traitées, la Rdc tournera en rond.  Nous irons de partenariat en partenariat sur la scène internationale tout comme on pourra organiser toutes sortes d’élections au niveau national, former et reformer des parties politiques mais tout ça ne produira pas grand-chose.    

Le problème de la Rdc est avant tout d’ordre technique.  C’est le manque de compétences techniques dont les conséquences sur le plan politiques sont catastrophiques pour le pays. Tant que le côté technique restera non résolu, toute démarche pour changer le destin du pays ne serait que de l’aventure qui ajouterait des nouvelles dimensions de complexités au problème existant. 

Une crise qui avait commencé comme une aventure d’Independence est devenue une crise existentielle qui sans intervention adéquate amènerait la Rdc dans sa tombe avec tout ce que ça aura comme conséquence sur le peuple congolais. 

C’est le manque des compétences techniques qui est au centre de la confusion quant à la direction que doit prendre le pays. C’est à cause de cette même crise technique que les discussions par les politiciens, intellectuels et académiciens congolais concernant la crise congolaise, ont plutôt une tendance soit philosophique plein de rhétorique, mais sans contribution pratique concernant la solution aux problèmes qui paralysent le pays.  Les partis politiques, quant à eux, cherchent à aller au-delà du principe naturel qui dit : « On ne peut pas donner ce que l’on n’a pas ». Ils s’aventurent (tous sans exception) à produire ce qu’ils appellent « projets des sociétés » qui en réalité ne sont que des travaux de mimétisme qui ne touchent pas le fond du problème et surtout que les partis eux même sont les produits du problème qu’ils prétendent vouloir résoudre.

L’espace qui devrait servir des solutions pratiques est usurpé pour des discussions politiques ainsi qu’ académiques inutiles souvent absurdes détachées de la réalité et sans compétences techniques nécessaires pour résoudre le problème du pays qui en réalité nécessite une maitrise solide de la technocratie gouvernementale.  Ce n’est pas un fait du hasard que le pays ne fait que s’enfoncer, la raison est bien simple : on ne peut pas donner ce que l’on n’a pas malgré, les slogans politiques comme les discours.  Ceci veut dire tout simplement que la solution au problème congolais passe par une réforme politico-administrative profonde qui malheureusement demandent des compétences, connaissances et un parcours spécifique.  Sans la connaissance nécessaire pour recréer le système l’existence de la Rdc est incertaine.  Comme c’est le système qui détermine la qualité des acteurs qui joignent le club et que c’est le système aussi qui programme ou déprogramme les individus, le besoin d’un nouveau système est donc impératif.

10. L’expérience du printemps arabe

L’expérience récente du printemps arabe a démontré que la pression non accompagnée par le savoir-faire technique a tendance à être stérile comme c’était le cas en Tunisie, en Egypte et au Soudan.  Dans tous ces trois pays, les jeunes ont démontré leur héroïsme en renversant des dictateurs bien établis pendant des décennies, dans l’esprit de se débarrasser du système pourri de l’intérieur.  Malheureusement, l’ingrédient essentiel qui est « le savoir-faire technique » manquait dans leurs démarches.  Le résultat était un gaspillage d’énergie et d’opportunité dans le sens que tous les trois pays se retrouvent encore aujourd’hui au point de départ.

Partie III

11. La crise de la Rdc et la stratégie politique

L’aventure de l’Indépendance a mis les acteurs politiques congolais en face d’un puzzle/défi dont ils n’avaient aucune connaissance ni de la conception globale ni de la formule sur la façon de l’assembler.   Le résultat a été un désordre enchevêtré, irréalisable qui n’a fait que se compliquer à chaque nouvelle expérience pour trouver le moyen de le contourner. Les acteurs politiques viennent et partent sans solution en ajoutant des couches supplémentaires au problème, ce qui rend l’équation encore beaucoup plus complexe. 

Le changement de leadership, par voie des urnes comme par force n’est qu’une infime partie de la démarche pour changer le destin d’une nation voire même insignifiant dans le cadre de la Rdc.  Le changement des membres de l’équipage à bord du navire n’a de l’effet que si le navire lui-même est en bon état et que la direction du voyage est bien connue par les membres de l’équipage.  Par ailleurs, les voyageurs à bord, de peur d’être amené à une destination inconnue, ont la responsabilité de connaitre la destination du voyage. En d’autres termes, pour qu’il y ait changement les gouvernés doivent être en mesure de surveiller les gouvernants.

C’est-à-dire si les politiciens ont réellement le désir de sortir le pays du gouffre, l’approche politique doit radicalement changer. La formule à appliquer est celle dont les politiques doivent se faire accompagner de la connaissance technique. C’est ça l’approche à suivre qui doit commencer par identifier les sources des connaissances techniques malgré le fait que la technocratie gouvernementale est une expertise rare chez les africains et les congolais en particulier tant en Afrique que dans la diaspora à cause de la nature de son parcours interdisciplinaire qui est long et exigeant pour maitriser le domaine. Un leadership sérieux chercherait à investir dans ce domaine pour trouver un technicien compétent et en ferait la priorité des priorités. Le leadership politique se ferait alors accompagner par un technicien dans le domaine mais, il y a un piège car cette approche n’est pas une portion magique dans ce sens qu’elle marcherait seulement si le technicien combine trois éléments essentiels. C’est-à-dire primo il doit être un technicien qui connait et comprend bien le domaine, secundo il doit être un spécialiste dans le domaine, tertio il doit être capable de jouer le rôle de stratège technique. Sans la combinaison de ces trois éléments cette approche ne marchera pas non plus.   

12. Le stratège technique

Contrairement à d’autres rôles politiques, le rôle de stratège technique est un rôle de conception ainsi que celui d’opération technique. C’est-à-dire le stratège technique doit être capable d’aller droit au cœur du problème.  Dans le cas du Congo, il doit être capable de concevoir le mécanisme opérationnel qui fait défaut à la gouvernance. Le stratège technique doit donc être équipé d’une connaissance encyclopédique dans le domaine politico-administratif.  C’est lui qui devrait frayer le chemin et montrer la direction.  Il doit alors être équipé au préalable de la technocratie gouvernementale qui est un domaine interdisciplinaire qui nécessite la combinaison du parcours académique combiné avec l’expérience opérationnelle étendue dans le domaine. Le but de cette combinaison est d’exposer le technicien aux différents systèmes de gouvernance, leurs modes opérationnels, leurs arrangements politico-administratifs ainsi que leur interaction avec leurs dispositions constitutionnelles. Pour jouer effectivement le rôle de stratège technique, le technicien doit avoir une maitrise totale des éléments essentiels de deux principaux modèles de gouvernance entre autres le modèle anglo-saxon et le modèle latino-européen qui sont des fondations de tous les autres systèmes de gouvernance, leurs histoires, leurs structures, leurs forces comme leurs faiblesses. A cette connaissance doit être ajouter aussi la compréhension et le fonctionnement des systèmes intermédiaires de gouvernance dérivés de ces deux principaux systèmes tels que les différents systèmes asiatiques par exemple.  Sans cette combinaison complexe de connaissances et compétences, il serait pratiquement impossible d’initier des travaux de réformes qui sont complexes, plein des technicalités et qui exigent une capacité de conception originale. 

Equipé de cette expertise, le stratège technique jouerait alors le rôle de cerveau technique au centre du leadership politique dont le rôle principal serait de concevoir des structures et des programmes pour mettre en place les mécanismes opérationnels capables de soutenir différent programmes politiques. Il est important alors de souligner que la solution au problème de la Rdc ainsi que le devoir de la reconstruction du pays est la responsabilité des congolais seuls et non des partenaires de la Rdc, étant donné que le partenariat sur la scène internationale est déterminé par des intérêts des uns et des autres, non pas par la philanthropie.  Ceci est d’ailleurs confirmé par Stanley Fischer qui était économiste en chef à la Banque Mondiale en 1990 : « Je ne veux surtout pas laisser croire aux pays en développement que la communauté internationale va les aider, j’insiste donc au contraire sur le fait qu’il leur faut se débrouiller seuls » (Éric Toussaint, Banque Mondiale Une Histoire Critique, page 271).

13.  Conclusion

Compte tenu de tout ce qui précède, le changement du destin de la Rdc dépend de la volonté politique de ses acteurs à vouloir changer radicalement d’approche centrée sur la politique au profit de la formule technique ou les politiques doivent se faire accompagner de stratège technique.  C’est cette approche qui doit être la priorité des priorités dans le sens que le leadership politique doit investir dans la connaissance technique qui est le problème majeur qui fait préjudice à la gouvernance et qui est la source de la crise congolaise. C’est cette formule qui permettra à la Rdc de résoudre la crise perpétuelle enfin de bénéficier de ses richesses naturelles, de sa jeunesse, de son expérience démocratique, voire même de sa diaspora à l’instar de la Chine, de l’Inde comme d’Israël qui ont énormément bénéficié de l’expérience de leurs diasporas respectives. 

C’est cette intervention technique qui est au-delà des partis politiques qui doterait le pays des instruments de gouvernance qui font défaut à l’administration de la Rdc depuis son indépendance. Ce concept technique permettrait de résoudre les catalogues des problèmes comme le désordre, le tribalisme, la fraude, la corruption, les infrastructures, qui en réalité ne sont que des résultants du déficit en connaissance technique.

Tant que ce problème central ne sera pas résolu, les mésaventures politiques qui avaient commencées à l’Independence continueront jusqu’à ce que la Rdc aille exploser. Telle est la complexité de la crise congolaise.  Si en tant que peuple, nous resterons incapables de comprendre les enjeux ainsi que nous rassembler autour d’un programme technique pour résoudre la crise de la gouvernance, la décision concernant l’existence de la Rdc sera prise pour nous par d’autres peuples en fonction de leurs intérêts et nous deviendrons esclaves sur notre propre terre héritée de nos ancêtres. 

Pour toute information concernant les séminaires de formation, les consultations en matière de conseils techniques et les projets sis mentionnés, veuillez contacter l’auteur.

A propos de l’auteur

Kampap Katamanval est d’origine congolaise. Il est politologue, consultant et chercheur indépendant, formé à Oxford en Grande-Bretagne. Sa formation académique en sciences politiques et gouvernement était centrée sur les études du système politico-administratif britannique qui constitue le socle sur lequel le monde anglo-saxon, y compris les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les pays du Commonwealth tels que l’Inde, l’Afrique du Sud auquel on peut aussi ajouter Hong Kong qui était le moteur de la Chine, sont construits.  Ces études antérieures étaient suivies par un Masters et recherche doctoral en Politique Mondiale, avec les États-Unis au centre en tant que plaque tournante des affaires internationales.  Cette formation est complétée par une longue carrière gouvernementale de plus de vingt ans en Grande-Bretagne. La nature de ce parcours interdisciplinaire constitue une base de connaissances techniques qui permet d’approcher la crise de la Rdc sous un angle complètement différent et original.

Contact Email: goodgovernance.secretariat@gmail.com

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