Ils sont 125 militaires de l’Armée de libération du Congo (ALC), tous membres du Détachement de Protection Personnelle (DPP) de l’ancien vice-président et sénateur à vie Jean Pierre Bemba qui sont aujourd’hui les oubliés du Congo-Brazzaville à 45 Km sur la route du Nord dans le district d’Ignié.
Avec femmes et enfants, ils sont réfugiés dans ce « No Man’s Land » depuis 15 ans aux lendemains des affrontements contre les troupes de la Garde Républicaine de Kabila secondée par celles angolaises venues à la rescousse en pleine centre-ville de Kinshasa.
Avec leur chef de bataillon, le Major Jean Remy Genganze Basso, ils dénoncent leur abandon à l’étranger et réclament de Jean-Pierre Bemba et du Chef de l’Etat Félix Tshisekedi leur rapatriement au pays tellement leurs souffrances sont devenues insoutenables.
Tout avait commencé par l’échange de tirs à l’arme lourde, scènes de panique dans les rues, enfants consignés dans les écoles : Kinshasa connaissait le jeudi 22 mars 2007, sa première journée de violence depuis qu’à la fin novembre 2006 Jean-Pierre Bemba avait reconnu la victoire de son adversaire Joseph Kabila à l’élection présidentielle congolaise du 29 octobre 2006.
L’enjeu de ces combats, qui se s’étaient prolonger vendredi 23 mars 2007 ; était lié à la volonté du pouvoir de Kabila de dissoudre la garde personnelle de M. Bemba et d’incorporer dans l’armée régulière les quelque 100 hommes qui la composait, une opération que M. Bemba, ancien chef de guerre, vice-président et sénateur à vie désigné en janvier 2007 ; refusait au nom de la préservation de sa sécurité. Ces éléments étaient postés en face des Cimetière de la Gombe, résidence officielle de l’ancien vice-président lors de la transition 1+4.
Alors que la tension était vive depuis quelques jours aux abords de la résidence de M. Bemba, gardée par son « Détachement de Protection Personnelle » (DPP), des tirs isolés et à la provenance non établie avaient commencé jeudi peu avant midi. L’ultimatum lancé par le général Kisempia, alors chef d’Etat-major général des FARDC, avait expiré le 15 mars 2007.
Les combats entre le DPP et les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) se sont alors intensifiés, mettant en œuvre non seulement des armes légères mais des roquettes et des mortiers. L’hélicoptère personnel de Jean-Pierre Bemba stationné à son bureau de la Primature fut détruit durant ces affrontements.
Ces combattants militaires exilés dénoncent également la complicités de certains généraux issus de la composante MLC-ALC qui avaient voulu à tout prix en finir avec Jean Pierre Bemba en offrant sa tête à Kabila. Ils avaient refusé cela car en tant qu’éléments du groupe de la « DPP », ils étaient formés en matière de protection rapprochée, intervention et combat dans les zones urbaines ; en s’interposant pour empêcher l’arrestation de Jean-Pierre Bemba programmée par Kabila.
Après l’exfiltration de leur chef aux environs de 15h00’ pour un endroit sûr en la résidence de l’ambassadeur de l’Afrique du Sud, ils avaient tenu la tête jusqu’à 23h00’ avant de se dissimuler sous les ordres du Major Jean Remy Genganze Basso comme il n’y avait plus aucune raison de continuer le combat ; Jean Pierre Bemba étant déjà sous l’abri.
De ces combats l’on se rappellera que lorsque ces affrontements avaient éclatés aux alentours de la résidence de l’ex vice-président de la République dans la soirée du 22 mars 2007, son Détachement de Protection Personnelle (DPP) armée semblait l’emporter sur les FARDC.
Dépourvus de ravitaillement en munitions et vivres et coupé du renfort des troupes qui devaient venir de Maluku, les forces gouvernementales prendront le dessus sur le DPP de Jean-Pierre le 23 mars. Un nombre important de soldats de Bemba se rendront alors au QG de la Monuc et d’autres traverseront à Brazzaville.
Ce fut grâce à l’Eufor, la force européenne envoyée en RDC pour sécuriser les élections, composée essentiellement de soldats allemands ; que le calme était revenu dans la ville. Des impacts de ces affrontements sont encore visibles aujourd’hui dans certains murs de la zone rouge, notamment dans l’Immeuble Interpol situé Place Royale qui fut touché par une roquette.
Dans la confusion, le célèbre opérateur économique et célèbre changeur des devises, Hugo Tanzambi dit Kwele-Kwele a perdu sa vie, alors qu’il se trouvait dans l’immeuble abritant la Biac pour ses affaires privées. Même si le bilan officiel n’est jamais connu, bien d’autres citoyens congolais sont morts durant les affrontements entre les militaires de Kabila et Bemba le 22 et 23 mars 2007 à Kinshasa ; le chiffre de 200 morts étant avancé, militaires comme civils dont 3 écoliers en uniforme.
Des vaillants héros qui avaient défendu la personne sous leur protection, certains sont tombés dans l’accomplissement de leur mission avec abnégation et bravoure. Parmi eux : le Capitaine Mbungu, l’Adjudant Wete Sabuni, le 1er Sergent Major Mangaya Kaputula, le 1er Sergent Makambo et le Caporal Eminde. Pour leur chef de commandement, ils étaient « comptés parmi les meilleurs garde du corps à travers le monde ».
D’autres compagnons d’armes arrêtés qui ont croupis sans aucun jugement dans la Prison central de Makala durant tout le règne de Joseph Kabila ont fini par bénéficier d’une grâce présidentielle de Félix Tshisekedi en 2021.
La grande partie de la garde de Jean-Pierre Bemba ayant traversé le fleuve pour le Congo-Brazzaville, son leader réfugié à l’ambassade d’Afrique du Sud à Kinshasa, avait fini par prendre son avion le 11 avril 2007 pour un exil au Portugal mais officiellement pour raison de santé.
Il sera arrêté à Bruxelles en mai 2008 sur un mandat de la Cour Pénale International (CPI) pour des crimes commis en 2002 par les troupes de l’ALC en Centrafrique, Bemba a été innocenté et est rentré depuis lors à Kinshasa depuis 2018.
Roger DIKU et Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi