Par Belga
Cinq femmes, nées au Congo de la relation d’un homme blanc avec une femme noire, avaient été arrachées à leur famille maternelle à l’âge de deux, trois ou quatre ans pour être placées dans une institution religieuse, où elles disent avoir été victimes de mauvais traitements.
Le placement forcé d’enfants métis dans des orphelinats au Congo belge dans les années qui ont précédé l’indépendance ne peut être qualifié de « crime contre l’humanité », a jugé mercredi un tribunal belge, déboutant de leur action contre l’Etat cinq femmes métisses aujourd’hui septuagénaires.
Les plaignantes, quatre Belges et une Française, doivent désormais analyser la décision, mais « on fera plus que probablement appel », a déclaré à l’AFP leur avocate, Michèle Hirsch.
Cinq femmes, nées au Congo de la relation d’un homme blanc avec une femme noire, avaient été arrachées à leur famille maternelle à l’âge de deux, trois ou quatre ans pour être placées dans une institution religieuse, où elles disent avoir été victimes de mauvais traitements.
Les présumés crimes et violations des droits fondamentaux s’étendent de 1948 à 1961, entre la première entrée dans un orphelinat, et le moment où la dernière d’entre elles en est sorti, un an après l’indépendance de l’actuelle RDC.
Ces cinq femmes, devenues grands-mères, ont décidé l’an dernier de poursuivre l’Etat belge notamment pour « crimes contre l’humanité », une première en droit belge pour des faits datant de la période coloniale. Leurs avocats ont dénoncé ces placements comme un « système généralisé » mis en œuvre par l’administration belge et motivé selon eux par le racisme.
Mercredi, le tribunal civil de Bruxelles a considéré que, « tout inacceptable qu’elle soit aujourd’hui, la politique de placement d’enfants métis dans des institutions religieuses pour des motifs raciaux n’était pas, entre 1948 et 1961, considérée par la Communauté des Etats comme un crime contre l’humanité et incriminée comme telle ».
En conséquence, poursuit le jugement, selon un extrait transmis à l’AFP, le tribunal « a décidé qu’en vertu de la règle selon laquelle nul ne peut être puni pour un crime qui n’existait pas (au moment des faits reprochés), l’Etat belge ne pouvait aujourd’hui être puni pénalement du chef de crime contre l’humanité pour des faits qui à l’époque n’étaient pas qualifiables d’un tel crime ».
Le jugement souligne que l’incrimination du chef de crime contre l’humanité n’est apparue dans le droit belge qu’avec une loi de 1999.
Le tribunal juge aussi, à propos du reproche fait à l’Etat belge de violation des droits fondamentaux, que l’action des plaignantes, « introduite plus de 60 ans après les faits, est tardive ».
Les avocats de l’Etat belge avaient insisté à l’audience le 14 octobre sur cet argument de la prescription des poursuites.
S’appuyant sur un régime juridique applicable à l’Etat belge depuis le XIXe siècle, ils avaient assuré qu’une faute supposée de l’Etat ne pouvait lui être reprochée que dans un délai de cinq ans.
Ce procès est le premier en Belgique à mettre en lumière le sort réservé aux métis nés dans les anciennes colonies belges (Congo, Rwanda, Burundi), dont le nombre est généralement estimé à autour de 15.000.
La plupart des enfants nés de l’union entre une Noire et un Blanc n’étaient pas reconnus par leur père, et ne devaient se mêler ni aux Blancs, ni aux Africains.
« Durant la colonisation, le métis était considéré comme une menace pour la suprématie de la race blanche, il fallait l’écarter », avait lancé Me Hirsch devant le tribunal.
Outre le placement forcé et les mauvais traitements à l’orphelinat, certaines plaignantes ont dénoncé « un deuxième abandon » lorsque, après l’indépendance, ces fillettes, contrairement aux religieuses blanches, n’ont pas pu monter dans les camions de l’ONU pour être rapatriées avec les Occidentaux.
Plusieurs d’entre elles, alors âgées de 10-12 ans, disent avoir été victimes de viols de la part de rebelles armés.
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