home Politique, RD Congo Elections en RDC : La machine à voter est-elle plutôt une machine à tricher ?

Elections en RDC : La machine à voter est-elle plutôt une machine à tricher ?

Le 23 décembre prochain, les Congolais seront appelés à élire leur prochain président. Joseph Kabila, s’il respecte la Constitution, cédera sa place après 17 années au pouvoir. Une élection d’autant plus attendue qu’elle a déjà été reportée deux fois alors que le mandat de Joseph Kabila a officiellement pris fin en 2016.

Mais à deux mois du scrutin, tous les regards se tournent vers les nouvelles machines à voter directement importées par la société privée sud-coréenne Miru Systems. C’est avec cette technologie que les Congolais éliront l’un des 21 candidats à la présidentielle. Mais, pour l’opposition et plusieurs organisations de la société civile, il s’agit plutôt de « machines à tricher », de machines susceptibles de favoriser le candidat du parti au pouvoir désigné par Joseph Kabila lui-même, Emmanuel Ramazani Shadary.

Comment cela fonctionne ?

La République démocratique du Congo rompt donc avec la tradition du vote papier. Ces machines à voter fonctionnent davantage comme des machines à imprimer. Via à un écran tactile, les électeurs sélectionnent la photo du candidat qu’ils souhaitent élire puis impriment leur choix. Pas de QR code donc comme pour nos élections communales en Région bruxelloise cette année mais bien un bulletin papier qu’il faut ensuite déposer dans une urne.

« C’est une nouvelle technologie dont on ne connait pas la fiabilité » 

Le jeudi 18 octobre, 11 des 21 candidats à la présidentielle, se réclamant de l’opposition, ont à nouveau rejeté ce nouveau dispositif électoral. Parmi eux, l’ex-ministre des Relations avec le Parlement, mais aussi les opposants Martin Fayulu, Freddy Matungulu et Marie-Josée Ifoku. « Le mode de vote autorisé par les législateurs congolais est le vote à bulletin papier. L’article 237 ter de la loi électorale a expressément interdit le vote électronique pour les élections en cours » a affirmé, au nom des dix autres candidats, Théodore Ngoy.

Selon Dieudonné Wamu Oyatambwe, politologue et membre actif de l’ONG Solidarité Mondiale, si cette machine divise l’opinion, c’est parce que la population n’a aucun écho de la fiabilité de cette nouvelle technologie : « On ne sait pas dire : dans tel pays, cela a fourni tel résultat ». Selon lui, dès le départ, rien n’a été mis en œuvre par la Commission électorale nationale indépendante (CÉNI) pour que cette machine gagne la confiance des électeurs : « Les gens ont découvert cette machine quand le choix pour cette technologie avait déjà été fait. C’est comme cela que des suspicions sont nées dès la préparation des élections ».

Soucieux de dégonfler cette polémique, le porte-parole du gouvernement et Ministre de la Communication et des Médias en RDC, Lambert Mende Omalanga nous assure que tout est organisé dans les règles. « Cette machine sert à réduire le volume du papier utilisé, à gagner du temps et de l’argent. Aux précédentes élections, on se retrouvait parfois avec l’équivalent d’un dictionnaire papier dans les bureaux de vote ». Et d’ajouter : « S’il est possible de frauder, qu’on nous le prouve ».

Très critique envers les motivations de l’opposition, Lambert Mende assure que la Commission chargée de ces élections est une « institution qui travaille en totale indépendance ». « L’opposition veut postposer ces élections parce qu’ils ne sont pas prêts à nous faire face mais on ne va pas se laisser faire. On ne leur fera pas ce cadeau »., conclut-il.

La CÉNI, vraiment indépendante ? 

S’il est difficile de remettre en cause une machine imprimant directement des bulletins de votes, Dieudonné Wamu Oyatambwe s’interroge justement sur la marge d’autonomie que laisse le parti au pouvoir à la CÉNI. Contrairement à ce qu’affirme le porte-parole du gouvernement de la RDC, son indépendance est loin d’être assurée nous explique-t-il : « La CÉNI semble très inféodée au pouvoir en place. Le président de la CÉNI a été proposé par l’Eglise Évangélique représentée par un sénateur de la majorité ». Traduisez : « Si Joseph Kabila dit A, les membres de la CÉNI diront A. S’il dit B, ils diront B ». Pour ce politologue, il est donc là le plus gros problème. « C’est l’ensemble du processus qu’il aurait fallu changer. Tout était entaché d’irrégularités dès le départ ».

Pour Dieudonné Wamu Oyatambwe, l’opposition n’est toutefois pas assez armée pour remporter le scrutin. Encore faut-il également que tous les Congolais qui le souhaitent puissent y participer. En effet, ces machines demandent l’installation de générateurs électriques et les coupures de courant très fréquentes dans le pays pourraient bien, à leur tour, perturber une élection censée tourner une page politique importante dans le pays.

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