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Affaire Mirindi : Jacques Ndjoli recadre pour dire « Halte à l’hérésie et la délinquance constitutionnelle » [OPINION]

La réflexion de M. Mirindi commandée par un estomac affamé n’est ni la science ni de l’objectivité. En droit constitutionnel ou ailleurs, le bon sens doit être le leitmotiv de tout interprète d’un texte de loi, autrement, on produit du nocif et de l’impropre.

En faisant l’interprétation téléologique du texte constitutionnel de 2006 (la raison d’être) l’objectif de son élaboration était la rupture avec les esprits démoniaques du passé par l’alternance démocratique et l’instauration de l’Etat de droit. D’où la mise en place à l’article 220 du principe d’immutabilité de certaines dispositions constitutionnelles considérées comme socle de l’identité constitutionnelle et fondement de son architecture.

C’est ici que M Mirindi est dans la perdition tombant dans la délinquance constitutionnelle. Ses élucubrations démontrent une fois de plus les actes et tentatives d’assassinat par des mécanismes anticonstitutionnels dont sont victimes les Constitutions africaines.

Qu’un prétendu constitutionnaliste se plaise à réfléchir sur comment violer, tordre le texte constitutionnel par des théories chimériques et indigestes, ceci doit être assimilé à un médecin criminel procédant à l’ablation d’un organe vital.

Lire aussi notre article : RDC : Jean Cyrus Mirindi et Me Jean Mbuyu, Une troublante conversation téléphonique https://www.afriwave.com/2018/05/28/rdc-jean-cyrus-mirindi-et-me-jean-mbuyu-une-troublante-conversation-telephonique/

Sa perdition sur fond sur d’amalgame nécessite le recyclage ci-après :

Le scrutin est différent du suffrage.

Ces deux notions élémentaires sont dissociées. Et en droit constitutionnel congolais elles ne bénéficient pas de la même protection juridique. L’une est révisable, l’autre est intangible. La lecture des articles 70, 71 et 220 de la Constitution nous fixe là-dessus.

Le scrutin est l’ensemble d’opérations des votes et des modes de calcul destinés à départager les candidats.

Les modes de scrutin désignent comment seront déterminés et comptabilisés les résultats.

Le scrutin peut être majoritaire (consiste à attribuer le siège convoité au candidat ayant obtenu le plus de voix, il peut être à deux tours ou à un tour), proportionnel (permet à chaque parti politique d’obtenir un nombre de sièges proportionnel au nombre de voix qu’il a obtenu), ou encore le scrutin mixte qui combien les deux précédents modes.

On distingue aussi le scrutin uninominal du scrutin plurinominal. Le premier se caractérise par le fait que le citoyen ne vote que pour un candidat, et dans le second chaque électeur vote pour une série des candidats inscrits sur un même bulletin de vote.

Le mode de scrutin pour l’élection présidentielle posé par l’article 71 et révisé en 2011 n’est pas cadenassé par l’article 220 de la Constitution. Il n’est pas repris parmi les matières intangibles de la Constitution. On ne peut lui imposer le principe d’immutabilité.

Le choix des modes de scrutin n’est jamais neutre ni stable. Au regard des luttes politiques, des contraintes et des positions des acteurs, il est sujet à controverses et débats comme c’est le cas aujourd’hui en France à propos de la représentation proportionnelle.

Le principe d’immutabilité concerne plutôt le principe du suffrage universel, la durée et le nombre des mandats. Cela est posé dans l’article 220 de la Constitution.

Le suffrage est l’acte ou le droit de vote par lequel un citoyen porte son choix lors d’une élection.

Le suffrage peut être universel (ici tous les citoyens majeurs peuvent votent), direct ( le citoyen vote lui-même), indirect (le candidat est élu par un collège électoral), restreint (on limite le vote e fonction des critères comme le revenu dans le suffrage censitaire).

L’article 70 dispose que le Président est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois.

Cette disposition est intangible, elle est verrouillée par l’article 220. Elle est la clé de voûte, et représente l’essence même de la Constitution du 18 février 2006.

Vouloir la transgresser par des arguments fallacieux, des hérésies et théories à la Mirindi c’est dénaturer le texte constitutionnel.

Soutenir cette thèse « mirindienne » c’est exposer le Président à une poursuite pour haute trahison.

En outre, l’accord du 31 décembre 2016 qu’on a piétiné avait reconnu au point II du chapitre 2 l’épuisement de deux mandats du Président actuel.

Cet accord vaut convention constitutionnelle. C’est un texte pas formellement constitutionnel mais matériellement constitutionnel (de par son contenu et sa place). Il a une valeur constitutionnelle.

Où était ce génie constitutionnaliste à l’époque ? Pourquoi l’Accord a été piétiné, détourné et contourné ?

Le refus de se soumettre à cette convention exhibe le fait que le problème n’est pas dans le texte mais dans l’homme. Il y a volonté de pérenniser un individu, de conserver avatiquement le pouvoir, de domestiquer et confisquer les institutions étatiques.

Enfin, lorsque vous affirmez être chercheur, vous devez être guidé par l’esprit de rationalité et de vérité. Dans votre obsession de constitutionnaliser l’inconstitutionnalité, de monarchiser ce régime, vous donnez l’exemple de la Franc en méconnaissance de l’histoire politique et constitutionnelle française.

En effet, M Chirac n’avait pas bénéficié de la révision constitutionnelle de 2000 réduisant la durée du mandat de 7 à 5 ans pour avoir la possibilité de se représenter en 2007. À l’époque, c’est à dire avant la révision constitutionnelle, il était possible pour le Président d’exercer plus de 2 mandats consécutifs.

La question essentielle du droit constitutionnel n’est pas mécanique mais philosophique.

Je dis sotériologique ou spirituelle à savoir la sacralité du texte. Pour y accéder … il faut une mutation civilisationnelle.

Cyprus Mirindi était mon étudiant. Dès qu’il m’a fait part de son raisonnement, je lui ai dit qu’il devait refuser de jouer ce mauvais rôle. La science constitutionnelle a une mission axiologique : celle d’asseoir le constitutionnalisme, protéger les droits fondamentaux.

La domestication du pouvoir politique au service du bien commun. Un constitutionnaliste n’est pas un apprenti sorcier, un coursier de putschistes.

Il doit se repentir. Moi je souffre en l ‘entendant. On ne vient pas à l’université pour apprendre à tuer son peuple. Je redis et particulièrement à mon étudiant Mirindi (pour la dernière fois).

  1. S’il était assistant, il l’aurait compris ; dans ce corps d’élite un assistant ne corrige pas son père ou maître.
  2. Le droit constitutionnel est une science qui se construit sur un fond : la consolidation de l’Etat de droit et de la démocratie.
  3. Lorsque on recourt à une jurisprudence sénégalaise contestée unanimement par la doctrine, il faut savoir que le débat avait porté sur leurs articles 27 et 104 qui traitent de la durée du mandat (art 70 RDC verrouillé par 220) alors que l’analyse de Mirindi veut faire une analogie avec le passage de 2 tours à un tour, qui n’a pas touché le principe du suffrage universel.
  4. Mon jeune étudiant dit qu’il y a eu fraude…en 2011. Peut-il construire une théorie sur pied de la fraude ? Du mal ?
  5. Mirindi sait que je l‘aime beaucoup. C’est dommage qu’il soit perdu dans le droit de transports à l’Ogefrem. Il aurait fait un bon assistant. Il aurait préparé son DEA et plus tard son doctorat.
  6. En tant que son père, je refuse qu’il soit perdu dans les méandres des médiocres, les jurisprudences sénégalaise, burundaise ou rwandaise ne feront de lui qu’un juriste de mauvaise qualité. Qu’il se ressaisisse. Qu’il renonce à la perdition, au griotisme, nous nous trompons tous, moi le premier.

Le Professeur Jacques Ndjoli termine par :

« Faire de la recherche en droit constitutionnel ne veut pas dire pondre des inepties, valider des incuries et constitutionnaliser le passage en force par du droit fallacieux. Le droit constitutionnel s’épanouie dans un cadre civilisé loin de l’anomie, des contorsions et des dictatures prédatrices ».

Par le Prof. Jacques Ndjoli.

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