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La Belgafrique, quand Bruxelles garde un pied au Congo

Par Jacques Deveaux@GeopolisAfrique

La Belgique, elle aussi, a possédé son empire colonial, dont la pièce maîtresse était l’actuelle République Démocratique du Congo. Bruxelles y conserve de nombreux intérêts, notamment dans les mines. La richesse de certaines familles s’y est construite. La carrière d’hommes politiques s’y est forgée. Le magazine « Jeune Afrique » y consacre un dossier.

On connaît la Françafrique, souvent à la Une des journaux. L’activisme de la France pour protéger ses intérêts sur le continent est réputé. Plus modeste et plus discrète, la Belgafrique est aussi une réalité. Elle est née en 1960, lors de la proclamation de l’indépendance du Congo et surtout de la sécession, dans la foulée, du Katanga. Les industriels belges voulaient défendre leurs mines et ont soutenu Moïse Tchombé, le président de la région séparatiste. Guerre, barbouzes, paras et mercenaires… le jeune pays va plonger dans la violence. L’aventure s’achèvera trois ans plus tard, avec l’intervention de l’ONU. Le Katanga retournera dans le giron congolais.

Jeune Afrique dresse la liste des personnages influents de la Belgafrique. Des hommes politiques « passionnés par le Congo ». Leurs réseaux « ont été constitués grâce à des contacts humains, souvent affectifs, parfois mâtinés de paternalisme ». Parmi eux, deux noms ne sont pas des inconnus du grand public : Davignon et Michel.

Louis Michel

Dans la famille Michel, je voudrais le père. On connaît son fils, Charles, Premier ministre de Belgique depuis 2014. Louis Michel, le papa, est une figure, un dinosaure de la politique belge, et un personnage incontournable de la Belgafrique. Il a été ministre des Affaires étrangères de 1999 à 2004. Aujourd’hui député européen, il copréside également l’assemblée Afrique-Caraïbes-Pacifique-Europe. Dans le cadre de son activité au Parlement européen, il croise beaucoup de responsables africains. Il est à l’origine du règlement européen sur les minerais de conflits, appelés aussi diamants de sang.

Louis Michel lors d’un discours pendant le congrès du Parti libéral à Louvain en 2010. © Reuters/Sébastien Pirlet

Etienne Davignon

Quant à Etienne Davignon, c’est une figure de la commission européenne dont il a été le coprésident entre 1981 et 1985. Il fut notamment chargé de la restructuration de la sidérurgie. Auparavant, il avait passé 17 ans au sein de la diplomatie belge, commençant sa carrière en 1959, à la veille de l’indépendance du Congo. Il est d’ailleurs présent à Léopoldville quand l’indépendance est proclamée. Il est fier d’avoir gagné la confiance des nouveaux maîtres du pays, malgré la rupture des relations avec Bruxelles. Parallèlement, il collectionne les fauteuils dans les conseils d’administration. « Son parcours, écrit Le Soir, est celui d’un grand commis d’Etat qui passe avec brio aux affaires privées ». Et de conclure : « Etienne Davignon est avant tout un homme de très grande influence ». Une influence qui va jusqu’en Afrique.

Etienne Davignon est également le président du mouvement « Les amis de l’Europe ». © Flickr

Les hommes d’affaires

Si la France a Bolloré en Afrique, la Belgique peut compter sur George Forrest. Le représentant de la troisième génération est à la tête d’un groupe colossal. La holding Groupe Forrest International est présente dans le BTP, l’élevage, le transport aérien, le ciment. Présent en Afrique depuis 1922, « le Groupe Forrest est aujourd’hui actif dans les secteurs des énergies renouvelables, de la construction, des mines et de la métallurgie, de l’agroalimentaire ou encore de la finance » indique le site internet du groupe. On surnomme George Forrest, le vice-roi du Katanga !

Si ces groupes familiaux belges ont réussi à résister à toutes les vicissitudes de l’Histoire, c’est qu’ils ont tissé des liens étroits avec le pouvoir. Forrest avait l’oreille de Mobutu, ce qui a sans doute évité une nationalisation du groupe. A la chute du dictateur, Forrest a fait allégeance au nouveau maître Laurent-Désiré Kabila, nous explique Jeune Afrique.

Camion chantier à Gécamines à Kolwezi. Depuis 1966, la Gécamines a remplacé l’Union minière du Haut Katanga à Kolwezi. © AFP

Cette politique de rapprochement n’a pas changé. Mais à l’image de Finasucre, le développement des sociétés se fait aussi hors Afrique. L’économie se mondialise et le Congo ne suffit plus, ni même le continent. Bien plus discrète que sa grande sœur la Françafrique, la Belgafrique poursuit son chemin.

Ndlr : pour l’illustration de son article inspiré du dossier paru dans Jeune Afrique, Jacques Deveaux@GeopolisAfrique a recouru à une capture d’écran de notre article : RDC-Belgique : Joseph Kabila et Charles Michel en tête-à-tête à New-York https://www.afriwave.com/?p=5052 .

Lire l’article ici : La Belgafrique, quand Bruxelles garde un pied au Congo http://geopolis.francetvinfo.fr/la-belgafrique-quand-bruxelles-garde-un-pied-au-congo-168947

Rencontre Michel-Kabila 22 septembre 2017 à New-York. Le Premier ministre belge Charles Michel a rencontré le président de la République Démocratique du Congo, Joseph Kabila le 22 septembre 2017 à New-York. © Capture d’écran du site Afriwave

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