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Dossier de l’Histoire, Devoir de Mémoire : il était une fois le 24 novembre 1965

24 novembre 1965 – 24 novembre 2016. 51 ans déjà qu’un Coup d’Etat militaire dirigé par le  Lieutenant-Colonel Joseph-Désiré Mobutu qui deviendra plus tard le Marechal Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga. Avec ses compagnons de la Révolution, ils renverseront les institutions démocratiques issues de l’indépendance chèrement arrachée face aux colons belges le 30 juin 1960 pour motif de mettre fin au désordre constaté dans le pays depuis son indépendance. Alors que tout promettait un pays prospère au service de sa population après 80 ans d’une humiliante colonisation, ce coup de force de l’armée deviendra un ACTE fondateur du DESORDRE POLITIQUE que connait et traverse le pays jusqu’à ce jour.

Les compagnons de cette époque sont avec leur grade : Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga, Maréchal et Grand Chancelier; Singa Boyenge Mosambaye, Général d’Armée; Bobozo Salelo Ndembo Aduluma, Général d’Armée; Mulamba Nyunyi wa Kadima, Général de Corps d’Armée; Massiala Kinkela Kulu Kangala, Général de Corps d’Armée; N’Zoigba Yeu Ngoli, Général de Corps d’Armée; Itambo Munkina wa Kambala, Général de Corps d’Armée; Ingila Grima, Général de Corps d’Armée; Bangala Oto wa Ngama, Général de Brigade; Tukuzu Gusu Wo, Général de Brigade; Busaki Belenge, Général de Brigade; Malila-Ma Kende, Colonel; Monyango Bikoko, Colonel; Tshatshi, Colonel; Wabali Bakitambisa, Général de Brigade; Nkulufa Lombindo, Général de Brigade; Lonoh Malangi, Lieutenant-Colonel; Ilosono Bekili, Capitaine.

A côté de ces hommes en uniforme s’ajoutera Marie Antoinette Gbiatene Gbiatibua affectueusement appelée « maman Mobutu, «la bien-aimée de tout un peuple» disait-on, disparue en 1977 dans des circonstances qui font partie de la légende. Compagne des premières heures, elle fut assimilée aux Compagnons de la Révolution, ces militaires qui accompagnaient son mari dans son coup d’État du matin du 24 novembre 1965.

Le message comme les intentions étaient plus que clair : «Chers compatriotes, ici c’est le colonel Mobutu Joseph, chef d’état-major de l’armée nationale congolaise, qui vous parle de Léopoldville. L’armée nationale congolaise a décidé de neutraliser le chef de l’État jusqu’à la date du 31 décembre 1960 […]. Il ne s’agit pas d’un coup d’État militaire, mais plutôt d’une simple révolution pacifique. L’armée va aider le pays à résoudre ses différents problèmes qui deviennent de plus en plus aigus…».

Aujourd’hui et 51 ans plus tard, il revient à dire que l’acte fondateur du régime Mobutu dont le Congo Zaïre est aujourd’hui victime, ce coup d’État militaire était à dénoncer fondamentalement comme acte d’indiscipline militaire, d’atteinte à la sécurité de l’État et surtout de déstabilisation des Institutions légalement et démocratiquement établies à l’époque. Ce que n’avait pas manqué de dénoncer la Conférence nationale Souveraine (CNS) en 1990. Dans sa Déclaration de politique générale à la CNS, L’Association des Moralistes Zaïrois (AMOZA) notait ceci à propos de Mobutu et son accession au pouvoir en 1965 : «En tant que tel, ce coup d’État instaurait la loi de la jungle : le triomphe de la loi du plus fort qui est « déraison » car il mettait fin à l’exigence démocratique et républicaine qui veut que l’accès au pouvoir et surtout à la magistrature suprême soit l’expression de la volonté populaire qui en donne le mandat. Il écartait ainsi le Souverain primaire (c’est-à-dire le Peuple congolais) de toute instance de prise de décision et le privait de ce fait de toute prétention de contrôle et de demande de comptes à ses dirigeants».

A la chute du régime de la Deuxième République de Mobutu, il était malheureux de constater que les promesses n’étaient pas tenues, les  objectifs n’avaient  pas été atteints pour des raisons au moins semblables, sinon pires que celles pour lesquelles on avait  justifié le coup d’état militaire du 24 novembre 1965. En effet, à cette date, le Haut Commandement militaire justifiait son coup de force en ces termes : «En prenant ces graves décisions, le Haut Commandement de l’armée nationale congolaise espère que le peuple congolais lui en sera reconnaissant, car son seul but est de lui assurer la paix, le calme, la tranquillité et la prospérité qui lui ont fait cruellement défaut depuis l’accession du pays à l’indépendance. Le Haut Commandement de l’armée nationale congolaise souligne avec force que les décisions qu’il a prises n’auront pas pour conséquence une dictature militaire. Seul l’amour de la patrie et le sens de responsabilités vis-à-vis de la Nation congolaise ont guidé le Haut Commandement à prendre ces mesures. Il en témoigne devant l’histoire ».

De toutes ces promesses faites, rares le seront réalisées. La naissance du MPR et sa proclamation officielle le 20 mai 1967 consolidaient les objectifs poursuivis. Dans le préambule de son manifeste on pouvait même lire : le MPR proclame que son but est de libérer les Zaïrois et les Zaïroises de toutes les servitudes et d’assurer leur progrès en édifiant une République vraiment sociale et vraiment démocratique. Après 32 ans d’un pouvoir absolu, monocratique et dictatorial, la réalité fut dramatique. C’était sans aussi compter avec l’imaginaire de «coup d’État militaire» monté ou manqué et les exécutions sommaires des incriminés pour se débarrasser de concurrents gênants ou de l’élite militaire. Nombre des jeunes officiers Kasaïens et Katangais pour la plupart avec à leur tête le Major Kalume furent exécutés pour complot, une manière de se débarrasser des éléments les plus que compétents que comptait l’armée nationale.

L’histoire et son éternel recommencement

Les années 2016 avec sa grave crise politique devenue institutionnelle par le refus de Joseph Kabila d’abandonner le pouvoir ressemblent à s’y méprendre à celles 1990 : l’autorité de l’État a cessé d’exister et les signes annonciateurs sont connus : actes de violence impunis, rançonnements en tous genres, extorsions, brimades, brutalité et tracasseries diverses auxquels les forces de l’ordre contraignaient les paisibles citoyens. Les arrestations arbitraires, les intimidations d’opposants politiques, les exactions sur la presse libre et indépendante tout comme sur les journalistes engagés…

Des Corps des Volontaires de la Révolution(CVR) au MPR parti-Etat et son effondrement le 24 avril 1990, le Congo-Zaïre redevenu Congo en aura tout vu. Du Général des corps d’armées au Maréchal, il n’aura manqué à Mobutu que de s’autoproclamer Empereur à vie sur un peuple zaïrois chosifié comme s’il n’existait pas. Mais c’était sans compter avec l’avènement en URSS d’un nouveau jeune dirigeant du parti communiste soviétique en la personne de Mikaïl Gorbatchev. La fin de la guerre froide entre l’Est communiste et l’Ouest démocratique finira par faire tomber le Mur de Berlin en 1989 grâce à la nouvelle politique de transparence soviétique, la Glasnost et la Pérestroïka.

La révolution issue de la victoire du 17 mai 1997 téléguidée depuis l’Ouganda et le Rwanda pour renverser Mobutu et installer le régime de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) est arrivé à sa fin de cycle. Laurent-Désiré Kabila qui n’avait rien compris de tout cela y a laissé de sa vie dans un assassinat sanglant. De ses Comités Populaires du Peuple (CPP) au PPRD triomphant d’aujourd’hui sous Joseph Kabila, rien de nouveau sous le soleil du nouveau Congo si ce n’est la nouvelle emprise sur les organes de l’Etat déguisée en une forme de démocratie.

 

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