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Kyungu Mutanga dit «Gédéon», la nouvelle vie de «Pacha» d’un criminel qui aimerait devenir politique

Méconnaissable qu’il peut se fondre dans la population sans se faire reconnaître par beaucoup en dehors de ses proches, tête complètement rasée de sa chevelure touffue, visage émacié rehaussé des petites lunettes rondes et moulé dans un costume beaucoup trop large pour le contenir. Lui, c’est pourtant bien Kyungu Mutala dit «Gédéon», le célèbre criminel congolais qui se la coule douce dans Lubumbashi depuis sa réapparition miracle du 11 octobre 2016. Plus d’un mois après cet épisode surréaliste, il tente aujourd’hui de se donner une nouvelle image pour une nouvelle vie qu’il aimerait politique. Ce qui ne plaît pas à tout le monde.

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«Tout est possible dans ce pays que nous a légué Lumumba de qui tout le monde se réclame de son idéologie aujourd’hui. Décidément, nous n’avons pas de chance depuis l’indépendance de 1960. Hier sous le diktat du colonisateur belge, aujourd’hui sous celui des nouveaux thuriféraires qui se prennent pour des rois alors qu’ils ne sont que des roitelets sans réel plumage. Nous sommes plus que fatigué et nous attendons la vraie indépendance de ce pays avec le changement du régime qui doit très vite intervenir» soupire un homme presqu’en colère et qui se tient en face de notre reporter. Cet homme, ancien cadre mobutiste convaincu à l’époque du MPR parti-Etat du feu Maréchal Mobutu, aujourd’hui converti au kabilisme est un haut responsable politique de la Majorité Présidentielle (MP) du Haut Katanga à Lubumbashi. Il a exigé un anonymat total avant de se confier au correspondant de  www.afriwave.com.

Il nous aura fallu plusieurs semaines pour le rencontrer alors que c’est lui qui avait émis le souhait de rencontrer un journaliste via un intermédiaire dans la capitale du cuivre. C’est écœuré de voir la tournure que prend les choses avec «le nouveau train de vie de Pacha» que mène un criminel condamné à mort en 2009 pour crimes de guerre, rébellion et cannibalisme avant qu’il ne s’évade spectaculairement deux ans plus tard en 2011; et pour qui aucun responsable, ni à Kinshasa ni à Lubumbashi, n’ose donner une simple explication.

Notre témoin en furie se demande s’il existe encore une justice dans ce pays. Car pour lui, «le congolais moyen a plus que difficile à nouer les deux bouts du mois avec un salaire de misère qui n’existe que de nom. Nourrir ses enfants, les scolariser, les soigner, payer son loyer si l’on n’est pas propriétaire» sont autant des calvaires qu’il faut surmonter dit-il.

Cadre PPRD de la province du Haut-Katanga, le parti du président Joseph Kabila et collaborateur proche dans l’entourage du gouverneur Kazembe, il poursuit : «la reddition de Gédéon Kyungu n’a jamais été spontanée. C’est une sordide affaire arrangée qui dira un jour très bientôt sa vraie visée politique. Sinon, l’on, ne peut expliquer au peuple la nature de tous les avantages en matériel accordés à ce triste personnage : logement de luxe dans une villa de l’Etat dans le beau et huppé Quartier Golf au 11, avenue Georges-Mawine alors que sa vraie place est dans une prison à très haute sécurité pour qu’il ne récidive pas en s’évadant avec l’aide des complices, véhicule 4X4 pour moyen de transport, gardes de sécurité. Pendant ce temps, le peuple dans sa majorité peine et sue au vu et au su de nos dirigeants qui s’en mettent pleines les poches. Entre autre preuve, le dernier mariage d’un membre de famille de notre gouverneur Kazembe où une révoltante débauche des moyens a été constatée par tous».

Notre interlocuteur poursuit : «Où est la place des familles et des victimes de cet individu  qui a semé la terreur dans son triangle de la mort Mitwaba-Manono-Pweto entre 2003 et 2006 ? Pourquoi Kinshasa et Lubumbashi ne disent mot jusqu’à ce jour quant à la réparation en faveur de ces victimes ? Trop, c’en est de trop et l’on comprend pourquoi le peuple révolté veut descendre dans la rue pour manifester sa colère et son ardent désir du changement. Par les mensonges de ses conseillers occultes, le président Mobutu n’avait jamais senti que le vent du changement allait l’emporter alors que ses Consultations populaires et la Conférence nationale Souveraine (CNS) l’y avait bien sentir. Le président Joseph Kabila en qui nous avions cru à cause de sa jeunesse en âge et en état esprit supposé est aujourd’hui tombé dans la même erreur à cause des mêmes conseillers qui le manipule tous les jours. Je crains que lorsqu’il s’en rendra compte, il sera trop tard» conclut-il avant de disparaître comme vent dans la nature, de la manière dont il nous avait rejoints dans ce parc.

Cette colère légitime de la part d’un haut cadre du parti au pouvoir traduit bien la grande exaspération de la majeure partie de la population en cette période dure sur le plan socio-économique. A en croire à l’idée même que la milice Bakata Katanga de Kyungu Mutanga se transforme en parti politique du nom du Mouvement des Indépendantistes Révolutionnaires Africains (Mira) -un nom si bien trouvé et qui explique tout-; il y a à parier que la crise politique actuelle qui s’est mué en une crise institutionnelle a encore des beaux jours devant elle.

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