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RD Congo : dialogue politique inclusif, des mesures de décrispations qui se font attendre et des prisonniers politiques toujours incarcérés…

Le dialogue politique inclusif s’est achevé le 18 octobre courant à Kinshasa que les yeux de tous sont aujourd’hui tournés vers la formation du prochain gouvernement d’union nationale pour une gestion consensuelle du pays en attendant les futures probables élections prévues pour 2018.

Pourtant, la convocation de ce forum avait entre autre question la décrispation de la situation générale si tendue par des mesures concrètes. Parmi celles-ci la libération des prisonniers politiques et la cessation des poursuites contre les opposants notamment Moise Katumbi, Jean-Claude Muyambo Kassa et Eugène Diomi Ndongala. Si le premier séjourne en Europe depuis des mois et que des menaces d’arrestation pèsent sur lui, les deux autres sont toujours incarcérés dans la prison centrale de Makala à Kinshasa. L’Accord politique global signé entre la Majorité Présidentielle et la frange minoritaire de l’opposition ne fait aucun cas de cette question sensible des prisonniers politiques.

Dans une publication datée du 18 septembre 2016 dernier, l’organisation de Défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) fait état d’une liste des prisonniers politiques en détention à Kinshasa dont le sort n’aura jamais été évoqué lors du dialogue de Kinshasa (https://www.hrw.org/sites/default/files/supporting_resources/list_of_prisoners_in_detention_-_fr.pdf ).

Nombre des personnes arrêtées et incarcérées entre avril et mai 2016 font partie du cercle proche de l’ancien gouverneur du Katanga Moïse Katumbi devenu opposant et candidat déclaré à la prochaine présidentielle dans le pays. Il est aujourd’hui accusé et poursuivi selon HRW pour «un prétendu recrutement des mercenaires, [parmi lesquels] plusieurs anciens militaires américains». L’américain Darryl Lewis, ancien garde du corps privé de Moise Katumbi arrêté dans cette affaire a été libéré et expulsé vers son pays (lire https://www.afriwave.com/?p=312 et https://www.afriwave.com/?p=576 ). Les congolais impliqués sont toujours eux en détention comme le détaille la liste de HRW :

  • Yannick Kibinga : proche de Katumbi, arrêté le 24 avril 2016 à Lubumbashi et transféré le 25 avril à l’Agence nationale de renseignements (ANR) à Kinshasa, où il a été détenu par les services de renseignements, avant d’être envoyé devant le parquet le 29 mai. Il est détenu à la prison centrale de Kinshasa depuis le 4 juin;
  • Franck Mwashila : proche de Katumbi, arrêté le 24 avril 2016 à Lubumbashi, puis transféré le 25 avril à l’ANR à Kinshasa, où il a d’abord été détenu par les services de renseignements, puis été envoyé devant le parquet le 29 mai. Il est détenu à la prison centrale de Kinshasa depuis le 4 juin;
  • Sefu Idi : proche de Katumbi arrêté le 24 avril 2016 à Lubumbashi, et transféré le 25 avril à l’ANR à Kinshasa, où il a été détenu par les services de renseignements puis envoyé devant le parquet le 29 mai. Il est détenu à la prison centrale de Kinshasa depuis le 4 juin;
  • Aaron Ngwashi Chalwe Munkutu: officier de la Police Nationale Congolaise (PNC) attaché à la sécurité de Katumbi alors qu’il était gouverneur de la province du Katanga, arrêté à Lubumbashi le 4 mai 2016. Il a été détenu par l’ANR à Lubumbashi, avant d’être transféré à l’auditorat militaire puis à la prison centrale de Lubumbashi, où il a été poursuivi pour violations des consignes. Il a été envoyé à l’ANR de Kinshasa le 29 mai, détenu au secret, et par la suite transféré à la prison centrale de Kinshasa le 13 juin;
  • Augustin Kabamba : officier de la Police attaché à la sécurité de Katumbi alors qu’il était gouverneur de la province du Katanga, arrêté à Lubumbashi le 4 mai 2016. Il a été détenu par l’ANR à Lubumbashi, avant d’être transféré à l’auditorat militaire puis à la prison centrale de Lubumbashi où il a été poursuivi pour faux et usage de faux. Il a été envoyé à l’ANR de Kinshasa le 29 mai, détenu au secret, et par la suite transféré à la prison centrale de Kinshasa le 13 juin.
  • Ndol Tshamundj : officier de l’armée, en fonction dans la ville natale de Katumbi, arrêté à Lubumbashi le 8 mai 2016 et transféré le 29 mai à Kinshasa, où il a été gardé au secret par l’ANR. Il est détenu à la prison centrale de Kinshasa depuis le 13 juin;
  • Bruno Vumbi : officier de la Police et arrêté à Lubumbashi le 4 mai 2016. Il a été détenu par l’ANR à Lubumbashi, avant d’être transféré à l’auditorat militaire puis à la prison centrale de Lubumbashi où il a été poursuivi pour faux en écriture. Le 29 mai, il a été envoyé à l’ANR de Kinshasa où il a été détenu au secret. Il sera par la suite transféré à la prison centrale de Kinshasa le 13 juin;
  • Fiston Malanga : étudiant, arrêté le 2 mai 2016 à Lubumbashi. Transféré à Kinshasa le 3 mai, et détenu au secret par les services de renseignements, avant d’être transféré à la prison centrale de Kinshasa le 4 juin;
  • Gédeon Butandu : pasteur, arrêté le 1er mai 2016 à Kolwezi dans la province du Lualaba. Transféré à Kinshasa le 3 mai, et détenu au secret par les services de renseignements, avant d’être transféré à la prison centrale de Kinshasa le 4 juin;
  • Huit Mulongo : ancien directeur de Cabinet de Moïse Katumbi, et l’un des dirigeants du Front Citoyen 2016, une coalition de partis et de groupes qui exhortent le président Kabila à accepter l’actuelle limite constitutionnelle du mandat présidentiel. Arrêté la nuit du 22 avril 2016 à son domicile par des éléments de la police après qu’on ait trouvé un revolver dans sa jeep, dont Mulongo a affirmé qu’il était dûment enregistré, et des tracts relatifs au G7 (une plateforme de sept partis politiques qui ont été écartés en septembre 2015 de la coalition majoritaire formée autour du président Kabila, après avoir appelé publiquement ce dernier à organiser l’élection présidentielle dans les délais prévus, et à apporter son appui à un successeur) et au Front Citoyen à son domicile. Il a été ensuite conduit au bureau des services de renseignements (ANR), puis transféré le lendemain à l’Auditorat militaire. Il est actuellement détenu à la prison de la Kassapa à Lubumbashi, où on état de santé se dégrade. Le 30 août, il a été condamné par la justice militaire à trois ans de prison ferme, et à une amende de 250 000 francs congolais (250 $US) de frais d’instance, pour port illégal d’arme à feu. Il a fait appel.

Le journaliste de www.afriwave.com qui s’est rendu dans le Centre pénitencier de Makala dans la Commune de Selembao a rencontré des hommes fatigués, malades mais combatifs pour leur cause et qui ne réclament qu’une chose : que justice soit dite dans leurs cas. Ils s’offusquent en outre du fait qu’un criminel assassin comme Kyungu Mutanga Wa Bafunkwa Kanonga dit Gédéon soit accueilli avec honneur par le gouvernement alors qu’eux moisissent en prison. Car expliquent-ils tous en cœur, ils ont des familles qui souffrent de leur absence à cause de leur si longue incarcération sans aucun jugement ni aucune condamnation. Le prochain gouvernement d’union nationale issu du dialogue politique inclusif pour la gestion consensuelle du pays a donc du pain sur la planche.

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