A voir la promptitude du Procureur Général près la Cour de cassation Firmin Mvonde Mambu à solliciter la lever des immunités parlementaires du Ministre de la Justice et Garde des Sceaux Constant Mutamba Tungunga, il ne manquait plus que la délectation du président de l’Assemblée Nationale Kamerhe Lwa Kanyiginyi Nkingi dans son annonce ainsi que les applaudissements zélés de la plénière du 21 mai 2025 pour comprendre qu’en politique, on n’a pas que des amis et il n’existe pas de pardon.
Règlement de compte ou vengeance, c’est selon car du PGR près la Cour de cassation Mvonde au président de l’Assemblée nationale Kamerhe, on ne peut comprendre la célérité dont ils ont fait preuve dans cette affaire. Donnant la parole au député Jacques Djoli Eseng’Ekeli, Rapporteur de l’Assemblée nationale afin de lire le réquisitoire reçu de la justice, sans se rendre compte que son micro demeurait encore ouvert, Kamerhe parle clairement de la démission de Mutamba : « il sera obligé de démissionner pour se défendre » ; chose qu’il n’avait jamais fait lui-même lorsqu’il fut inculpé et emprisonné alors qu’il était Directeur de Cabinet du Chef de l’Etat jusqu’à ce qu’il soit remplacé par Guylain Nyembo Mbwizya.
Avec un franc-parler sans gants que certains assimile au populisme, Constant Mutamba Tungunga, le jeune Ministre d’Etat, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux dérange le vieil establishment politique du pays habitué dans les magouilles en tous genres. Ce qui lui vaut aujourd’hui ce qui s’apparente à un règlement de compte savamment bien préparé soit pour le déstabiliser ou le voir carrément tombé.
Il aura fallu d’une rumeur et d’un document attribué à la Direction Générale du Contrôle des Marchés Publics (DGCMP) circulant sur les réseaux sociaux et faisant état du détournement de 39 millions de dollars dans le cadre des projets de construction de nouvelles prisons modernes et maisons d’arrêt pour que l’opinion s’emballe à l’encontre de Constant Mutamba.
A cause d’une mise au point précipitée du Cabinet du ministre datée du 11 mai 2025 et s’engouffrant dans la brèche ouverte ; la Cour de cassation par Firmin Mvonde sollicitait de l’Assemblée nationale l’autorisation des poursuites à l’encontre du ministre Constant Mutamba, qui serait mis en cause dans cette affaire de détournement de fonds destinés à la construction d’une nouvelle prison, spécifiquement celle de Kisangani dans la province de la Tshopo.
De la « présumée » affaire Mutamba et la controverse qu’elle provoque, l’on parle des « résultats d’une enquête préliminaire révélant des indices sérieux de mauvaise gestion financière. Les éléments réunis évoquant des détournements en lien avec la gestion de fonds destinés à des projets d’intérêt public » sans plus.

L’affaire découle de soupçons de détournement de 39 millions de dollars destinés à la construction d’une nouvelle prison à Kisangani, dans la province de la Tshopo. Selon le réquisitoire du Procureur Général près la Cour de cassation, 19 millions de dollars versés à l’entreprise Zion Construction SARL, adjudicataire du marché ; proviendraient du Fonds de Réparation et d’indemnisation des Victimes des Activités Illicites de l’Ouganda (FRIVAO) en RDC. Ladite société créée en mars 2024 aurait décroché le marché dans des conditions jugées opaques, sans appel d’offres transparent. Ce flou sur la régularité du processus a rapidement attiré l’attention du Parlement, bien avant la saisine même du parquet.
Pourtant, le ministre Mutamba avait annoncé le 30 juillet 2024 à Kisangani, l’ouverture d’une enquête et la création d’une commission sur la gestion de ce fonds suite aux critiques de victimes de la Guerre des Six jours dans Kisangani, le chef-lieu de la province de la Tshopo en 2000 avait été le théâtre d’affrontements meurtriers entre les deux armées d’occupation ougandaise et rwandaise qui avaient envahi l’Est de la RDC durant la deuxième guerre du Congo (1998-2003). Il avait même ordonné au parquet général de la Cour d’appel de la province de la Tshopo d’entamer des poursuites contre l’équipe de gestion dudit Fonds.
Mutamba contre magistrature : une guerre ouverte
Depuis son arrivée à la tête du ministère de la Justice, il ne s’est pas fait que des amis au contraire. C’est une guerre ouverte qui a été enclenchée entre le ministre de la Justice la magistrature qui a atteint son paroxysme lors des Etats Généraux de la Justice. Mutamba avait fait de la traque des corrompus et autres fraudeurs son cheval de bataille, ce qui n’a jamais enchanté les habitués des magouilles politiques et n’étonne que ce soit désormais lui qui est accusé d’avoir contourné les règles dans un contrat opaque de 39 millions USD pour la construction d’une prison à Kisangani. Du chasseur de corrompus au chassé, il ne pouvait qu’être la cible d’une magistrature en quête de revanche.
En attendant l’audition de Mutamba par la commission mise en place à l’Assemblée nationale, un courrier de la Cellule Nationale des Renseignements Financiers (CENAREF) adressé à la Première ministre Judith Suminwa a confirmé qu’un transfert de 19 millions de dollars avait bien été effectué au profit de l’entreprise contestée.
Si avec cette révélation l’on conforte l’hypothèse d’un usage douteux des deniers publics, le Ministre des Finances a dans un communiqué dit qu’aucun paiement effectif n’a encore été réalisé pour la construction de ladite prison. De son côté, Constant Mutamba qui se défend vigoureusement précise que les fonds sont encore logés dans un compte séquestre, donc inaccessibles à l’entreprise adjudicataire, et que le dossier reste en traitement à la Primature.
Le cas Firmin Mvonde…
Dans la guerre ouverte Mutamba contre la magistrature, le cas Mvonde en est une illustration parfaite de cet amour-haine entre les deux corps de la justice ; d’un côté la magistrature et de l’autre le ministère. Si en novembre 2024 le Ministre ordonnait l’ouverture d’une enquête visant le Procureur Mvonde, soupçonné d’avoir acquis cash un bien immobilier au cœur de Bruxelles en Belgique ; en mai 2025, c’est le PGR Mvonde qui saisit l’Assemblée nationale afin de solliciter l’autorisation des poursuites contre le Ministre Mutamba, soupçonné de détournement des fonds publics.
A peine que les Etats Généraux de la Justice Congolaise du 06 au 13 Novembre 2024 venaient de se terminer à Kinshasa sur un constat amer d’une justice malade qu’il faut à tout prix guérir par sa réorganisation profonde, l’exemple ne venant toujours pas d’en haut par ceux qui doivent rendre les jugements conformément à la loi. C’était un air d’un nouveau scandale et pas de moindre que celui qui impliquait un animateur de la justice en la personne du Procureur Général près la Cour de Cassation, Firmin Mvonde Mambu.
Selon le journal online français, africaintelligence.fr daté de ce 22 novembre 2024 qui l’écrivait ; le haut magistrat congolais venait de faire une « petite » acquisition immobilière de prestige, en l’occurrence un « petit immeuble composé de trois étages luxueux à Bruxelles », la capitale belge. Selon les documents du cadastre belge consultés par notre confrère, « le bien en question, d’une superficie totale de 201 mètres carrés, est situé avenue de la Nivéole, dans le quartier de Mustsaard » à 1020 Commune de Laeken non du Château de Laeken où réside le roi des belges.
Le hic dans cette transaction, pour acquérir ce bien vendu près de 880.000 Euros soit près 910.000 dollars, « le haut magistrat congolais a transféré, au mois de juin (2024 NDLR), l’intégralité des fonds depuis son compte bancaire en RDC à l’étude (notariale NDLR) Leonard & Van Bellinghen, chargée de la transaction ». Les questions qui se posent sont celles de savoir comment est-ce qu’on peut acheter un bien pareil par du cash et que dit la loi en la matière pour justifier autant d’argent en liquide en liquide même en passant via une banque ? Ni le Procureur Général près la Cour de Cassation, ni le cabinet notarial de Bruxelles n’ont accepté de commenter l’information jusqu’à ce jour.
Une question en appelant d’autres. Dans l’hypothèse que Firmin Mvonde aurait contracté un crédit hypothécaire, avec quels garantie et revenu rembourserait-il un prêt de près de 800.000 Euros, à quel taux d’intérêt et en combien d’années par rapport à son âge ? Aujourd’hui âgé de 65 ans car né le 04 octobre 1959 à Lukala dans la province du Kongo Central, ce magistrat de carrière diplômé en Droit Privé Judiciaire de l’Université de Kinshasa tant déjà vers sa retraite.
N’ayant pas des bons rapports de collaboration comme l’ensemble de la magistrature avec le nouveau Ministre de la Justice et Garde des Sceaux Constant Mutamba, le Procureur Général près la Cour de Cassation Firmin Mvonde Mambu fait l’objet des enquêtes diligentées par le ministère devant être « menées par l’Inspection Générale des Finances (IGF), la CENAREF (La Cellule Nationale des Renseignements Financiers) et l’ANR (Agence Nationale des Renseignements) pour éclairer l’opinion sur ces faits ».

A lire aussi : Firmin Mvonde Mambu et sa petite prestigieuse acquisition immobilière cash au cœur de Bruxelles https://www.afriwave.com/2024/11/22/firmin-mvonde-mambu-et-sa-petite-prestigieuse-acquisition-immobiliere-cash-au-coeur-de-bruxelles/
Nommé il y à peine deux ans par le président de la République Félix Tshisekedi, Firmin Mvonde Mambu s’est illustré dans des dossiers aussi sensibles comme celui de la mort suspecte, en juillet de 2023, de l’ancien ministre de Transports Chérubin Okende Senga dont il avait conclu après enquête qu’il s’agissait d’un « suicide » du député.
C’est encore Firmin Mvonde qui réclamait à la Cour d’appel de Matete d’ouvrir une information judiciaire contre l’Archevêque de Kinshasa, le Cardinal Ambongo Besungu pour « comportement séditieux » suite à ses nombreuses déclarations dans les médias après les élections de 2023.
Son dernier fait d’arme c’est la « disculpation » de l’ancien ministre des Finances et actuel député national Nicolas Kazadi Nzuji pour « des faits présumés de surfacturation dans l’affaire dites des forages et lampadaires ». Pendant ce temps, l’ancien ministre de Développement rural François Rubota et l’homme d’affaires Mike Kasenga sont actuellement jugés pour le même dossier devant sa juridiction de la Cour de Cassation (hic !).
Que l’on se souvienne qu’à l’issue des États généraux de la Justice et avec réticence, l’Assemblée nationale avait jugé recevable le projet de loi sur le Parquet financier présenté par le Ministre d’État Mutamba. L’amélioration des conditions carcérales, l’inauguration des nouveaux bâtiments comme le projet de lancement construction des nouvelles prisons ; autant d’actions visibles ne pouvaient enchanter les « frappeurs » vis-à-vis de lui. Malheureusement, l’on chercher à lui faire payer aujourd’hui les quelques erreurs d’appréciations de la situation de sa part alors qu’il n’a commis aucun forfait nuisible au pays.
Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi pour afriwave.com