Après plus de 20 mois d’assignation à résidence, l’ancien président gabonais renversé par un coup d’État le 30 août 2023, Ali Bongo Ondimba, son épouse Sylvia et son fils Noureddin, sont arrivés à Luanda, la capitale de l’Angola, vendredi 16 mai. Au Gabon, leur départ en exil suscite des réactions contrastées.
La remise en liberté et le départ pour l’Angola de l’ancien président Ali Bongo Ondimba, de sa femme Sylvia et de leur fils Noureddin, vendredi 16 mai, n’ont pas tardé à faire l’objet de nombreuses réactions et commentaires au Gabon.
Chez ceux qui, au sein de la société civile comme dans la classe politique, se sont toujours opposés à l’ancien président gabonais, cette décision a évidemment bien du mal à passer. Intellectuel engagé et figure critique du système politique gabonais, Victor Mouang Mbading, la dénonce ainsi avec virulence. « Est ce que [la famille Bongo] va revenir au Gabon pour être jugée ? C’est un point d’interrogation. Quoi qu’il en soit, ce geste-là révèle une chose : que le « coup de libération » a aussi libéré les PDGistes qui ont pillé le Gabon comme Ali Bongo, sa femme et son fils », s’agace-t-il.
Au sein des familles des victimes de la crise post-électorale de 2016 également, l’exaspération est de mise. « Vous pensez un peu à comment nous, on se sent ? », lance de son côté la présidente de l’association Réconciliation, Aïcha Tsoumbou, au nouveau président gabonais Brice Oligui Nguema dans une vidéo qu’elle a publiée sur les réseaux sociaux.« La cinquième République est-t-elle là pour favoriser les personnes qui nous ont massacrés ? Pour favoriser l’injustice ? […] Monsieur le président, ça ne fait même pas un mois que vous avez pris le pouvoir, et vous avez déjà pris une telle décision. Qu’allons-nous penser de vous ? Avons-nous bien fait de vous élire ? », poursuit-elle dans ce même extrait, très en colère.
On comprend bien que les droits de l’homme, c’est à deux niveaux !
Aïcha Tsoumbou, présidente de l’association Réconciliation
Dans ce concert de critiques, une voix fait cependant exception. Bien qu’il ait toujours combattu Ali Bongo Ondimba, Georges Mpaga, le président du réseau des ONG gabonaises qui luttent en faveur de la bonne gouvernance, déclare malgré tout comprendre les raisons qui ont poussé à la libération de l’ancien président et de sa famille. « Je pense que ce sont des raisons d’État, des raisons humanitaires qui ont prévalu dans cette décision visant à l’exfiltration, donc à la libération, d’Ali Bongo », affirme celui-ci.
« La fin d’un long cauchemar »
Si, dans les rues de Libreville, les avis sont contrastés, du côté de la famille Bongo sans surprise, cette mesure apparaît en revanche comme un soulagement. « C’est pour eux la fin d’un long cauchemar, c’est pour nous le résultat de longs efforts, à la fois sur le plan judiciaire et diplomatique », se félicite ainsi Me François Zimmeray, l’un des avocats de la famille Bongo. « Il faut être conscient que mes clients sont depuis 20 mois privés de leur liberté, incarcérés de façon arbitraire et cruelle, et qu’ils ont été torturés […]. Aujourd’hui, cette famille a donc besoin de se soigner et de tourner la page », ajoute encore ce dernier, qui ajoute « ne pas croire » à un procès équitable pour Sylvia et Noureddine Bongo au Gabon et « ne pas savoir » si Luanda n’est qu’une étape ou bien un lieu d’établissement pérenne pour la famille Bongo.
Une grande partie de leur incarcération s’est déroulée en violation des droits fondamentaux les plus élémentaires.
Me François Zimmeray, avocat de la famille Bongo
De son côté, le Procureur général du Gabon, Eddy Minang, a lui expliqué que tous trois avaient été remis en liberté provisoire pour « raisons humanitaires » mais qu’un procès aurait lieu en présence ou en l’absence de Sylvia Bongo et de son fils Noureddin qui sont, l’un et l’autre, toujours poursuivis pour détournement de fonds publics, corruption, concussion, blanchiment de capitaux et faux et usage de faux.
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Par : RFI Lien vers l’article : https://www.rfi.fr/fr/afrique/20250517-l-exil-de-la-famille-bongo-en-angola-suscite-des-reactions-contrastees-au-gabon