Par : RFI Avec notre correspondant à Bruxelles, Pierre Benazet
Ce procès contre la Belgique est mené par cinq femmes métisses issues d’unions mixtes au Congo qui furent soustraites à leur famille et placées dans des instituts. Elles accusent la Belgique de crime contre l’humanité. Selon les autorités belges, ils seraient entre 14 000 et 20 000 dans ce cas et malgré leur nombre considérable, leur sort a longtemps été ignoré. En première instance, les juges avaient rejeté la motivation portée au nom des métisses par les cinq plaignantes âgées aujourd’hui de plus de 70 ans. Elles ont fait appel et un nouveau procès va donc se tenir.
En première instance, le tribunal avait débouté les cinq plaignantes au motif que « nul ne peut être puni pour un crime qui n’existait pas au moment des faits reprochés ». La conclusion du tribunal était que l’État belge ne pouvait aujourd’hui être puni pénalement du chef d’accusation de crime contre l’humanité pour des faits qui, à l’époque, n’étaient pas qualifiables d’un tel crime.
La plainte portait sur la période 1948-1961 et concernait l’ensemble de la politique de placement d’enfants métis dans des institutions religieuses. Des instituts gérés par l’Église, mais qui résultaient en fait d’une politique raciale voulue par l’administration coloniale.
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À l’époque, le colonisateur avait affirmé qu’il s’agissait de leur donner une éducation dite « à l’européenne » pour créer une caste de Congolais favorables au régime colonial. Mais en réalité, il y a eu une véritable politique concertée pour arracher ces enfants, appelés « mulâtres », à leur mère (même si leur père ne les avait pas reconnus) et pour les rendre en quelque sorte invisibles, car leur existence même remettait en cause la suprématie raciale de l’ordre colonial. Ces enfants étaient mis en marge à la fois de la société africaine et de la société coloniale.
Les avocats des plaignantes vont plaider en appel qu’en réalité, il s’agissait déjà à l’époque d’un crime contre l’humanité – et qu’il faut appliquer à la politique coloniale d’après-guerre les mêmes principes que le tribunal de Nuremberg a utilisé pour le régime nazi au sujet des crimes contre l’humanité.
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