Rwanda : 22 ans après, le fantôme d’Habyarimana poursuit et hante Paul Kagamé

Kigali, soirée du 6 avril 1994. Le Falcon 50 qui transporte le président rwandais Juvénal Habyarimana de retour de Dar Es Salam en Tanzanie est en phase d’approche pour atterrissage à l’aéroport de Kigali. Un missile tiré probablement d’un lieu proche ou de l’intérieur du camp militaire de Kanombe par des personnes non autrement identifiées atteint de plein fouet l’avion présidentiel qui s’écrase dans le jardin de la présidence. Bilan : 12 morts  dont trois français membres de l’équipage et aucun survivant. A bord de cet avion et dans cet accident périt également le président Habyarimana, le jeune président burundais fraîchement élu Cyprien Ntaryamira.

Le président zaïrois de l’époque, le Maréchal Mobutu qui se trouvait à Arusha pour le sommet sur la question rwandaise l’échappera bel. Car, ayant refusé l’invitation du président rwandais de prendre place à bord de son avion à destination de Kigali, préférant attendre la réparation de son propre avion en panne sur le tarmac en Tanzanie. Cet attentat ne sera que la première phase de ce qui deviendra la tragédie rwandaise autour du génocide qui sera perpétré par les éléments de l’armée et milices extrémistes hutus (ethnie d’Habyarimana) sur les tutsis et autres hutus modérés. Près d’un million des morts seront…

Les troupes de l’ex-armée rwandaise en déroute arrivées en Rd Congo avec armes et bagages sont à la base de l’insécurité ambiante qui règne dans cette partie Est du pays depuis plus de vingt ans avec sa cohorte des misères. La condamnation des anciens responsables militaires hutus par le Tribunal Pénal International sur le Rwanda (TIPR) délocalisé à Arusha en Tanzanie n’aura jamais contribué à la délivrance ni du pays ni de ses nouvelles autorités du fantôme d’Habyarimana qui hante tout le monde.

Il faut rappeler que le jour de cet attentat, les rebelles du Front Patriotique Rwandais dirigés par Paul Kagamé sont dans les faubourgs de la capitale après avoir conquis les ¾ du pays des mille collines et plusieurs mois des combats contre les forces gouvernementales. Le génocide aidant, le FPR s’emparera du pouvoir à Kigali jusqu’à ce jour en régnant sans aucun partage et ne tolérant aucune contestation. Vingt-deux ans plus tard, la justice française relance l’enquête en voulant entendre sur sa demande le général Faustin Kayumba Nyamwasa, ancien Chef d’Etat-major de l’armée et responsable des Services de renseignement rwandais passé dans la dissidence contre Paul Kagamé. Refugié en  Afrique du Sud depuis plusieurs années, cet ancien bras droit de Paul Kagamé a failli être assassiné par des individus lancés à ses trousses qu’il désigne comme étant des agents rwandais; ce que nie fermement le pouvoir de Kigali. Cette relance de l’enquête en France suscite des réactions diverses.

Selon l’AFP, la justice française a lancé une nouvelle commission rogatoire internationale pour entendre le général Kayumba Nyamwasa. Faustin Kayumba Nyamwasa, accuse depuis plusieurs années, Paul Kagamé d’être l’instigateur de l’attentat qui a coûté la vie à Juvénal Habyarimana et considéré comme l’élément déclencheur du génocide en 1994. Devenu un opposant à l’actuel chef de l’Etat rwandais, Faustin Kayumba Nyamwasa a renouvelé sa demande pour être entendu. Selon l’AFP, au soir du 6 avril 1994, il aurait appris de la bouche de Paul Kagamé lui-même que « l’avion du président Habyarimana avait été abattu par (nos) propres troupes » du FPR, est-il écrit dans sa déposition dont l’AFP a eu connaissance.

De cette enquête impossible qui n’a jamais apporté de réponse au génocide, aucune explication non plus n’a jamais été donnée au processus politico-militaire qui a conduit à cet effroyable drame même si l’on soupçonne qu’il avait été entamé bien avant avril 1994.  Si le régime de Kigali parle des négationnistes qui veulent déstabiliser le président Kagamé. Les opposants parmi lesquels des tutsis autrefois proches de Kagamé disent le contraire et attaquent un régime devenu autoritaire à tendance monarchique à Kigali, le contraire du combat qu’ils avaient mené contre l’ancien pouvoir hutu. Vexé par la témérité des juges français, Paul Kagamé a évoqué devant le parlement rwandais le 10 octobre 2016 la possibilité d’une nouvelle rupture des relations diplomatiques entre les deux pays comme en 2006.

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Rédaction

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