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Annie Mutamba, lobbyiste africaine au sein de l’UE et/avec Forbes Afrique

Annie Mutamba est spécialiste en communication et en lobbying au sein des institutions de l’Union européenne. Elle est la co-fondatrice de Meridia Partners, première agence de conseil bruxelloise spécialisée dans les relations institutionnelles entre l’Europe et l’Afrique.

Alors qu’elle travaille dans le domaine de la communication et du lobbying au sein des institutions européennes, Annie Mutamba, originaire de RDC, fait un constat qui l’inquiète : les intérêts des pays africains ne sont pas représentés dans les réunions ou manifestations pendant lesquelles l’Europe décide ou prépare des réglementations pouvant avoir un impact sur l’Afrique. C’est pour y remédier qu’elle décide de créer Meridia Partners, première agence basée à Bruxelles à représenter les intérêts africains au sein des institutions européennes. «Notre objectif était de viser le secteur privé. Les ambassades représentent déjà les États. Le secteur public a ses canaux et ses moyens de communication avec l’Europe. En revanche, le secteur privé, qui était véritablement visé par certaines dispositions réglementaires prises en Europe, n’était pas représenté», explique-t-elle.

Forte de ses quinze années d’expérience dans le lobbying et la communication d’influence, Annie Mutamba travaille actuellement avec des entreprises africaines spécialisées dans divers domaines tels que l’énergie, le transport, la logistique, l’agriculture et la chimie. Des secteurs qu’elle connaît bien, puisqu’avant de créer Meridia Partners, elle a été pendant dix ans en charge des programmes de communication institutionnelle au sein du département recherche et développement du Conseil européen de l’industrie chimique (CEFIC), qui représente 27 000 entreprises en Europe. À ce titre, elle était conseillère auprès de grandes entreprises comme Procter & Gamble, Unilever, ExxonMobil ou Total, et avait en charge l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies de lobbying dans le cadre des politiques européennes d’innovation, santé et environnement.

Elle était également chargée de la coordination de projets de communication avec l’OMS (Organisation mondiale de la santé), l’UNEP (United Nations Environment Programme) et l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). «C’était une opportunité assez exceptionnelle et intéressante car c’est le lobby qui est reconnu comme étant le plus influent sur Bruxelles. La gamme et la palette de tactiques et techniques d’influence est extrêmement variée et diverse dans cette organisation. J’étais en face des décideurs politiques, scientifiques, etc. Cela a été pour moi une formation beaucoup plus intéressante que l’université», se rappelle la directrice de Meridia Partners. En Afrique, l’agence est présente dans cinq pays : RDC, Côte d’Ivoire, Éthiopie, Kenya et Gabon. «Nous nous appuyons sur un réseau de consultants que nous mobilisons ad hoc en fonction des dossiers. Ils font également remonter certaines informations au niveau local», explique la consultante en affaires publiques européennes, spécialisée dans les relations Europe-Afrique.

Découverte du lobbying

Titulaire de deux maîtrises (Communication et Relations Internationales) obtenues respectivement à l’Université de Liège en Belgique et à l’Université de Bradford au Royaume-Uni, Annie Mutamba est entrée en contact avec le monde du lobbying aux États-Unis, à l’époque où elle effectuait un stage à Washington au sein de l’Africa Policy Information Center (aujourd’hui Africa Action), la plus ancienne organisation américaine dédiée aux affaires africaines. «Ça a été mon moment de révélation. Grâce à cette expérience, j’ai pu trouver le point commun entre différentes choses qui me plaisaient beaucoup : relations internationales, communication politique et communication gouvernementale». Après deux ans passés dans la capitale américaine, elle revient à Bruxelles pour des raisons personnelles.

Tout naturellement, elle cherche du travail dans le domaine des relations internationales et du lobbying européen. C’est ainsi qu’elle est contactée pour travailler au sein du lobby européen de la chimie. «J’y suis restée dix ans. Beaucoup de personnes me demandaient comment je pouvais défendre l’industrie chimique. Bien que n’étant pas toujours en phase avec certaines décisions, je suis restée pour apprendre et, à un moment donné, mettre cela au service de l’Afrique en général et de la RDC en particulier. Malheureusement, en tant qu’Africaine, je me suis vite sentie extrêmement isolée dans ce milieu-là. J’assistais à des réunions en tant que représentante du secteur chimique et non comme Africaine. Je devais donc poser les questions sur l’Afrique de manière informelle».

Privilégier la diplomatie publique en Afrique

Mais désormais, par le biais de sa structure Meridia Partners, Annie Mutamba défend concrètement les intérêts des pays africains grâce à une multitude de services : la veille réglementaire, législative et médiatique (qui permet de recueillir des données sur certaines réglementations existantes ou à venir), la représentation (être les yeux et les oreilles de diverses organisations ou entreprises semi publiques africaines), la communication (événements, organisation de rencontres, rédaction de discours, organisation de formations pour les équipes afin de familiariser ces dernières avec les mécanismes décisionnels de l’Europe et le langage eurocrate, et les habituer à suivre l’actualité qui peut concerner leurs activités sur le continent), etc. Par ailleurs, depuis 2010, elle dispense des cours en lobbying européen, politiques budgétaires européennes et communication politique au sein de l’Exécutive Master en communication et politiques européennes de l’IHECS (Institut des hautes études des communications sociales) de Bruxelles.

Pour la lobbyiste, chaque pays africain ou chaque région du continent devrait mettre en œuvre une communication et une diplomatie publique afin d’accompagner le processus d’émergence en Afrique. Aujourd’hui, grâce à Meridia Partners, elle espère avoir créé une impulsion afin que d’autres Africains puissent également se lancer dans la défense des intérêts d’entreprises privées africaines au sein des institutions européennes. «Mais c’est un cheminement qui est encore loin d’être abouti, il y a encore beaucoup à faire», conclut-elle.

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