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Papa Wemba, un hommage planétaire !

De Kinshasa à Abidjan, de Paris à Bruxelles, de Tokyo à Lubefu dans son ex-Kasaï Oriental de naissance, c’est un hommage planétaire qui a été rendu à Papa Wemba; mort subitement   au petit matin du 24 avril 2016 à Abidjan en Côte d’Ivoire loin de la terre natale de ses ancêtres. C’est la Cathédrale Notre Dame du Congo de la commune de Lingwala qui aura servi de cadre pour les adieux célébrés en son honneur. Et ce, après trois jours d’un deuil national empreint de douleur et d’émotion dans l’enceinte même du Parlement national au Palais du Peuple.

Lui, c’est Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba, dit Papa Wemba ou Jules Presley pour ses fans. Il restera l’un des musiciens qui ont marqué la musique de la RD Congo, cette RUMBA tant dansée par les mélomanes. L’artiste né le 14 juin 1949 à Lubefu au Congo belge (dans l’actuelle province du Sankuru) et qu’on pouvait s’imaginer immortel vu la longévité de sa carrière (presque 50 ans) était pourtant fragile comme le reste des êtres humains. Il est tombé les armes à la main sur le champ de bataille, foudroyé par une attaque cardiaque dont personne n’a su le tirer. C’est fut sur le podium du FEMUA (Festival des Musiques Urbaines d’Anoumabo), lors de sa  9ème édition.

Presqu’une légende vivante de la musique congolaise, hier encore Papa Wemba se disait disciple inspiré d’un autre monument, Tabu Ley Rochereau; lui-même considéré à juste titre comme l’un des rois de la Rumba congolaise. Comme Tabu Ley Rochereau, Papa Wemba fut un chanteur au timbre de voix haut placé doublé d’une bête infatigable de la scène. Le parallélisme entre les deux se prolonge comme indéfiniment : si Rochereau s’est imposé dans les années 60 comme l’une des stars de la Rumba et l’un des principaux ambassadeurs de ce courant à travers le monde jusqu’à être en 1970 le premier musicien africain de renom à se produire à l’Olympia à Paris; Papa Wemba lui a pris la relève fin des années 1980 jusqu’à sa mort.

Une carrière tonitruante

En 1969, il est le co-fondateur de Zaïko Langa Langa en 1969  en compagnie de Jossart N’yoka Longo, Evoloko Atshuamo, Pépé Felly Manuaku Waku et Andy Bimi Ombalé. Il quittera ce groupe en 1974, pour fonder Isifi Lokole avec Evoloko, puis Yoka lokole avec entre autres Mavuela Somo et Mbuta Mashakado. C’est finalement son propre groupe Viva La Musica crée en 1977 qui le propulsera au firmament de la célébrité.  Toujours en compagnie de son idole Tabu Ley, il est le deuxième artiste zaïro-congolais à avoir signé avec un label musical international, Real World de Peter Gabriel avec qui il publiera trois albums Le Voyageur (1992), Emotion (1995), Molokaï (1998). En 1980, il sort son premier succès panafricain Analengo. En 1986 alors qu’il est installé à Paris en France, il accroche une autre flèche à son arc au travers du cinéma avec «La vie est belle», une satire de la société zaïroise de l’époque Mobutu signée Ngangura Mweze. Ses titres, Maria Valencia et Le Voyageur sortis en 1999, feront partie de la bande son du film Paradiso e Iferno  du  réalisateur italien Bernardo Bertolucci.

Ecartelé entre plusieurs sons et rythmes de la musique du monde, Papa Wemba était pourtant resté fidèle à sa tradition et au Rumba national. C’est du reste sa fille Kady qui en parle mieux lors de l’oraison funèbre prononcé au Palais du Peuple : «Mon père avait su allier la tradition à la modernité. Malgré toute l’influence de l’Occident sur sa personnalité artistique, il était resté fortement attaché aux valeurs coutumières, ancestrales et traditionnelles de cette Afrique et de cette RDC dont il était si fortement imprégné… C’est vrai, il était un chef de clan, un patriarche». Et de poursuivre avec un trait de personnalité tendre à l’égard du défunt : «Papa était un père aimant, affectueux, très généreux et d’une hospitalité légendaire…Je vous révèlerai même qu’il a eu à adopter des enfants de la rue avec lesquels nous avons grandi et que nous considérons comme nos frères et sœurs. Nous avons vécu avec un père dont le témoignage, la générosité attestée par plusieurs ne pouvait que nous rendre fiers de lui. Parmi tant de valeurs qu’il nous a enseignées, le sens de la responsabilité en fait partie. J’en sais quelque chose, moi qui vous parle ».

Aimant la belle vie et les belles fringues, il sera considéré à juste titre comme le Pape de la SAPE (Société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes), cette portion des personnes ayant fait des beaux et couteux habits leur religion. Plusieurs surnoms l’auront accompagné tout au long de sa carrière : Mwalimu, M’zée, Jules Presley, Chef Coutumier, Bakala dia Kuba, Fula Ngenge, Kolo Histoire, Kuru Yaka, Vieux Bokul, Ekumani, Formateur des idoles, Maître d’École…

C’est l’archevêque de Kinshasa en personne, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya accompagné du président de la Cenco (Conférence épiscopale nationale du Congo) Mgr Nicolas Djomo; assistés de six évêques et d’une soixantaine de prêtes qui lui diront la messe de suffrage universelle.

Au cours de l’hommage officiel en présence du chef de l’Etat lundi 2 mai, Papa Wemba a été décoré par Joseph Kabila à titre posthume «Grand officier» de la plus prestigieuse Ordre national des Héros nationaux Kabila et Lumumba. Et ce, au regard au regard de bons et loyaux services rendus à la Nation congolaise, à l’Afrique et au monde dans le domaine culturel. Comme son illustre prédécesseur Tabu Ley, papa Wemba repose désormais depuis mercredi 4 mai 2016 à La Nécropole Entre Terre et Ciel de la commune périphérique de la N’Sele à Kinshasa.

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